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Réalisation : Wenders Wim - Scénario : Bjørn Olaf Johannessen - Montage : Toni Froschhammer - Musique : Alexandre Desplats - Photographie : Benoît Debie - Distribution France : Bac Film
Le film débute sur d’admirables vues de cabanes de pêcheurs, colorées, sur un lac gelé Canadien et, à l’intérieur de l’une d’elles, d’un homme, dans une atmosphère glaciale, se préparant à sortir. Elles illustrent la maîtrise artistique du réalisateur et de Benoit Debie, son directeur de la photographie, dans leurs choix : reflets, flocons révélés par la lumière, vapeur dégagée par une haleine tempérée au contact de l’air ambiant. L’incertitude de Tomas, un écrivain en mal d’inspiration, s’annonce en filigrane.
Plusieurs thèmes sont abordés, tous profondément humanistes. Il nous parle tout d'abord de culpabilité : celle d'une mère (Kate, bouleversante Charlotte Gainsbourg) qui a laissé ses deux enfants jouer sans surveillance sur une luge au voisinage de la route ; celle de Tomas, seul au volant dans le blizzard, perturbé par ses relations difficiles avec sa compagne, et qui n'a pas vu déboucher le petit bolide sur la route ; celle, moins facile à cerner, cependant essentielle dans le film, de Christopher, le frère survivant. Leur douleur est filmée en parallèle sur une période d’une dizaine d’années.
Alors que Kate trouve un soutien dans sa foi, la révélation progressive du caractère de Tomas, se remettant du drame, conduit à une nouvelle question. Sa profession ne le pousse-t-elle pas à mettre tout ce qu'il peut utiliser, et cet accident en particulier, au service de nouvelles inspirations ? Il ne veut pas d'enfant pour ne pas risquer la brillante carrière qui se dessine et il élimine tout ce qui pourrait gêner son ascension. « Rien ne peut te toucher » constate sa nouvelle compagne, sous-entendant « hors de ton oeuvre ». Son père, qui a consacré son existence à son laboratoire et se retrouve à la retraite seul, égoïste et désabusé, avec le sentiment d'une vie gâchée sans affection, préfigure ce qui attend Tomas dans quelques années.
Mais le jeune Christopher, devenu adolescent, par son attitude farouche d’enfant grandi sans père, peut-être par sa soif d'écrire qui le désigne un peu comme un héritier, engage Tomas sur un chemin nouveau : celui d'une quasi-paternité.
La délicatesse dans le traitement de ce sujet difficile évite le mélo sans masquer la souffrance des protagonistes. Les personnages se dévoilent dans leurs sentiments intimes à travers quelques gestes, quelques paroles. L'art d'un grand cinéaste !
Nicole Vercueil