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LES FILMS
La sélection officielle proposait cette année 19 films venus du monde entier.
Tous les jurys ont apprécié le niveau de cette sélection : des films de qualité, parfois très originaux.
Les films n’étant pas encore sortis en France, je propose une traduction provisoire des titres étrangers. Cette traduction devra naturellement être remplacée par la traduction officielle quand ils paraîtront sur nos écrans.
Ayadin Khachina / Rough hands / Mains rugueuses
Mohamed Asli - Maroc
Being Venice / Etre Venice
Miro Bilbrough – Australie ?
Bez Wstydu / Shameless / Ehonté
Filip Marczewski - Pologne
Boucherie Halal
Babek Aliassa – Canada
Gel Ni Dian Er Yan Se Guan / Just try me / A l’essai
Xiaotong Zhao – Chine (Mongolie intérieure)
La Niña / La gamine
David Ricker - USA – GB – Mexique
Le sac de farine
Kadija Leclère - Belgique / Maroc
Lycka Till Och ta Hand om Varandra /
Good Luck, and Take Care of Each Other
Bonne chance, et prenez soin les uns des autres
Jens Sjögren – Suède
Now, Forager. A film about Love and Fungi
Maintenant cueilleur. Un film sur l’amour et les champignons
Jason Cortlund et Julia Halperin – USA / Pologne
Rustom ki Dastaan / Ballad of Rustom / Ballade de Rustom
Ajita Suchitra Veera – Inde
Sa Gràscia / La Grâce
Bonifacio Angus – Italie (Sardaigne)
Seenelkälk / Mushrooming / La cueillette des champignons
Toomas Hussar - Estonie
Silent City / La cité silencieuse
Threes Anna – Pays-Bas / Luxembourg / Belgique
Soote Payan / Final Whistle / Le dernier souffle
Niki Karimi – Iran
Strawberries Fields / Les champs de fraises
Frances Lea – Grande-Bretagne
Thang Ka
Ha Si Chao Lu – Chine (Mongolie intérieure)
Tiempos Menos Modernos / Not so Modern Times
Des temps moins modernes
Simon Franco - Argentine / Chili
W Sypialni / In a bedroom / Dans une salle de bains
Tomasz Wasilewski – Pologne
When Yesterday comes / Quand vient le passé
4 courts métrages – Taïwan
Jury oecuménique
Pour les prix du jury oecuménique, ainsi que sa composition, cliquez ici
Le thème choisi « Vivre !...mais comment ? » permettait d’évoquer tous les aspects de la vie. Mais comme d’habitude, certains thèmes ont particulièrement intéressé les réalisateurs : la disparition inéluctable d’un monde ancien, et surtout l’évolution des rapports entre les hommes et les femmes.
Les films n’étant pas encore projetés en France, je propose une traduction littérale des titres. Cette traduction devra naurellement être modifiée quand les films auront un titre français « officiel ».
Autre disparition : celle des utopies des années 1970.
Le couple de « Maintenant cueilleur. Un film sur l’amour et les champignons» a toujours vécu en marge de la société, vivant de petits boulots et de cueillette des champignons. Mais Regina commence à se lasser de cette vie, rêve de sécurité et d’assurance maladie…
Quant au père de Venice (« Being Venice »), ancien poète hippie, il refait surface après des années et semble n’avoir pas évolué. Une image ridicule et pitoyable de soixante-huitard vieillissant.
Zakia (« Mains rugueuses »), une jeune institutrice marocaine, confrontée aux exigences de son fiancé qui veut qu’elle le rejoigne en Espagne, aux difficultés administratives pour obtenir un visa, à la corruption généralisée, finit par décider de rester au pays et de poser ses propres exigences. Et elle réussit à obtenir ce qu’elle désire.
Réussite également pour Sara (« Le sac de farine »). Abandonnée en Belgique dans un orphelinat tenu par des sœurs catholiques bienveillantes, elle est enlevée par son père, droguée - et se réveille au Maroc. Recueillie par une tante aimante, elle doit tout réapprendre, un nouveau mode de vie, une langue…et trouvera le moyen de se développer, de retrouver sa dignité.
Tout n’est pas facile non plus pour Jamila (« Boucherie Hallal ») : avec son mari Hedi, médecin iranien, elle a essayé de reconstruire au Canada une nouvelle vie. Les diplômes iraniens n’étant pas reconnus, ils ont ouvert une boucherie. Mais l’arrivée du père de Hedi, musulman radical, bouscule tous leurs projets : Jamila est stérile, Hedi est contraint de la répudier. Il l’aime, mais ne trouve pas en lui la force suffisante pour s’opposer à son père. Elle devra trouver toute seule son chemin en terre étrangère.
« La Niña » se situe dans un tout autre contexte : Ashley, une jeune américaine, se bat pour récupérer son fils confié à une famille d’accueil. Seule, sans argent, elle organise un trafic de clandestins entre le Mexique et les USA. Mais son inexpérience provoque une catastrophe au passage de la frontière. Elle va découvrir le sens des responsabilités en s’occupant de la petite Rosa, et prendre un nouveau départ.
Pour Sahar, (« Le dernier souffle »), jeune et talentueuse réalisatrice iranienne, il n’est pas question de départ. Elle est parfaitement reconnue dans son travail, et heureuse en ménage. C’est la découverte brutale de l’injustice qui l’amène à se révolter: la mère d’une de ses actrices va être pendue pour un crime qu’elle n’a pas commis. Sahar se lance alors dans un combat désespéré pour la sauver. Face à elle, c’est l’incompréhension : « On ne peut pas lutter contre toutes les injustices du monde, il y a des dizaines de cas semblables, et tu ne la connais même pas… ». Pendant qu’elle met toute son énergie en œuvre pour sauver cette femme, son mari et leurs amis se passionnent pour les matchs de football à la télévision. Le personnage de Sahar nous interroge : peut-on se battre seul contre l’inacceptable ? l’engagement peut-il avoir une limite ?
Irmina (« Ehonté ») est une jeune gitane qui vit en Pologne. Elle rêve d’étudier la médecine, mais rencontre de très nombreux obstacles : son père a décidé de la marier à un gitan, sa mère est incapable de l’aider à lutter, son ami Tadek est inconsistant, et de stupides nazillons polonais finissent de détruire ses projets. Elle devra épouser celui que son père lui destine.
Gillian (« Les champs de fraises») doit assumer seule sa propre vie et celle de sa soeur Emily, atteinte de graves troubles neveux.
Pourquoi Edyta (« Dans une salle de bains ») vit-elle dans la rue ? Cette belle femme élégante, soignée, cultivée, couche dans sa voiture et semble tomber dans la marginalité. Pourtant on sent bien qu’elle n’appartient pas au monde des exclus. Peu à peu se dessine un admirable portrait de femme en crise, qui ne sait pas elle-même ce qu’elle cherche ni ce qu’elle fuit. Au gré des rencontres, elle finit par se reconstruire.
D’autres films de la sélection ont pour personnage principal une jeune femme qui découvre la vie.
« Being Venice » : Venice ne réussit ni dans ses amours, ni dans son travail d’écrivain, ni dans ses relations avec son père.
« A l’essai» : dans la Chine d’aujourd’hui, l’héroïne essaie sans cesse de construire sa vie.
« La cité silencieuse » : une jeune néerlandaise se rend au Japon pour y apprendre l’art de découper les filets de poisson auprès de Maître Kon. La relation de maître à élève se joue dans une exigence stricte, mais respectueuse. Un film très original (qui a déjà vu un film sur les relations entre l’homme et le poisson ?), qui s’affranchit parfois de la réalité pour atteindre le surréalisme.
Il faut bien reconnaître qu’ils n’ont pas le beau rôle dans les films de cette sélection.
Beaucoup d’entre eux ont fui leurs responsabilités de pères : Venice, Sara, Ashley, Rosa …ont grandi sans père. Quelquefois ils font subitement leur réapparition, mais leur retour n’apporte que le désordre. Le père de Sara (« Le sac de farine ») l’abandonne, l’enlève, la drogue, l’abandonne une nouvelle fois au Maroc, et ne donne plus signe de vie. Dans la famille de Miriam (« Bonne chance et prenez soin les uns des autres »), pendant que la mère essaie de comprendre ce qui se passe chez sa fille adolescente, le père se réfugie dans des postures de yoga pour retrouver son équilibre intérieur, totalement étranger au drame qui se noue sous ses yeux.
D’autres pères, très présents ceux-là, se comportent en véritables tyrans et empêchent leurs enfants de s’épanouir : Hedi doit répudier sa femme, Irmina renoncer à la médecine.
Les jeunes hommes ne sont pas des personnages beaucoup plus positifs : Tadek («Ehonté ») s’agite beaucoup, se plie à toutes les nouvelles tendances politiques, change de femme sans état d’âme, et ne sert pas à grand-chose. Il n’aide ni sa sœur ni la jeune gitane qu’il semble pourtant aimer.
Ce festival nous a quand même offert deux magnifiques personnages masculins.
Alvar (« Bonne chance… »), un homme âgé et malade, vit dans le souvenir de sa femme en construisant un univers de figurines pleines de rêves nostalgiques. Il a assez de tendresse en lui pour y accueillir la jeune Miriam. Une rencontre faite de fantaisie, de délicatesse, de poésie.
Dans sa quête de soi-même, Edyta («Dans une salle de bains ») trouve également celui qui l’aidera à retrouver son chemin. Patryck, un photographe prévenant et authentiquement humain, l’aide sans rien exiger d’elle, avec finesse et intelligence.
Il est vrai que ces deux personnages ne sauraient représenter la virilité triomphante : l’un est un vieillard un peu naïf qui vit dans le rêve, et l’autre est homosexuel.
Qui connaît le cinéma estonien en France ?
Des jurés expérimentés m’avaient prévenue : avec les Estoniens, on peut s’attendre à tout. Et je n’ai pas été déçue !
La cueillette des champignons » est certainement le film le plus « déjanté » du festival. Aadu, un personnage politique important, part avec sa femme Viivi dans la forêt pour ramasser des champignons. Cette situation banale se transforme peu à peu en une aventure burlesque totalement imprévisible. Aadu se montre ridicule, stupide parfois (on apprend qu’il est manipulé par ses propres conseillers), et capable des pires exactions quand il se sent en difficulté. A la fin, sa faculté de retourner la situation à son avantage a de quoi laisser pantois le plus retors des hommes d’état. Un film drôle, sarcastique, où la dérision et l’humour noir sont au service d’une vision pertinente et acérée de notre société.
Une semaine très riche, pleine de découvertes, d’émotions et de rencontres.
Reste une question que se posent tous les membres des jurys : tous ces beaux films trouveront-ils un jour le chemin des écrans ? Tant de films vus dans les festivals disparaissent chaque année !
Paulette Queyroy
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