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Festival de Berlin 2018

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Lars Kraume © Studio Canal Gmbh Julia Terjung


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Réalisation et scénario : Lars Kraume, d’après le livre éponyme de Dietrich Garstka
Caméra : Jens Harant

Avec :
Leonard Scheicher (Theo Lemke), Tom Gramenz (Kurt Wächter), Lena Klenke (Lena), Isaiah Michalski (Paul), Jonas Dassler (Erik Babinski), Ronald Zehrfeld (Hermann Lemke), Florian Lukas (Principal Schwarz), Jördis Triebel (Frau Kessler), Michael Gwisdek (Edgar), Burghart Klaußner (Ministre Lange)

Lars Kraume
Né en 1973 en Italie, il a grandi à Francfort. Après avoir travaillé comme assistant photogrape dans la publicité, il a tourné son premier court métrage en 1992. Puis il étudie à l’Académie du Film de Berlin où son film de fin d’études gagne le Prix Adolf Grimme. Il a également réalisé plusieurs épisodes de séries policières et des films télévisés.

Filmographie :« (extrait)
1998 Dunckel
2005 Keine Lieder über Liebe 
2007 Guten Morgen, Herr Grothe · 
2008 Der frühe Abschied 
2010 Die kommenden Tage 
2013 Meine Schwestern 
2015 Fritz Bauer, un héro allemand (Der Staat gegen Fritz Bauer) 

Das schweigende Klassenzimmer (La classe silencieuse*)

de Lars Kraume, Allemagne 2018, 111 min, Berlinale Spécial 2018

Jonas Dassler, Leonard Scheicher, Lena Klenke, Isaiah Michalski, Tom Gramenz
© Studiocanal GmbH / Julia Terjung

Synopsis : 1956. Des lycéens de l’Allemagne de l’Est vont au cinéma à Berlin Ouest et voient des images des informations sur l’insurrection à Budapest. De retour à Stalinstadt (fondé en 1953, aujourd’hui Eisenhüttenstadt, une ville nouvelle construite pour les ouvriers du complexe sidérurgique), ils ont l’idée de tenir une minute de silence en classe pour les victimes de la lutte hongroise pour la liberté. Ni les garçons, ni leurs parents, ni l’administration de l’école ne sont préparés pour les réactions que cette manifestation de solidarité va provoquer. Le directeur de l’école tente d’étouffer l’affaire en la qualifiant de bêtise d’ados, mais les élèves se retrouvent pris dans la machine de l’Etat qui veut poser un exemple. Le ministre de l’Education qualifie leur acte de contre-revolutionnaire et demande aux élèves de donner les noms des meneurs, une décision qui aura des conséquences dramatiques pour leur avenir.

Le film est basé sur le livre éponyme de Dietrich Garstka qui y retrace sa propre histoire.

C’est l’histoire de jeunes qui pratiquement glissent dans un acte de résistance qu’aucun d’entre eux n’avait planifié et dont personne n’avait prévu les conséquences. Mais, sous la pression de l’Etat ils assument cet acte et grandissent à travers l’épreuve. C’est justement cette pression que l’Etat exerce à leur encontre qui leur fait comprendre la nature de l’oppression dont ils n’avaient jusqu’alors qu’une vision assez théorique, fiers qu’ils étaient d’être du bon côté de la barrière, celui des bons socialistes contre les vilains capitalistes. Et c’est précisément cette pression qui forge leur solidarité, une chose que ni leur professeurs ni l’appareil d’Etat n’ont compris – alors qu’auparavant leurs rêves tournaient davantage autour des filles, fumer, danser – et préparer leur bac. Alors que maintenant ils prennent conscience de la situation politique, qu’ils peuvent subir, dénoncer – ou fuir.

Particulièrement intéressant est l’évolution de la relation des trois personnages principaux avec leurs pères respectifs. 

Jonas Dassler, Isaiah Michalski, Tom Gramenz, Leonard Scheicher © Studio Canal Gmbh Julia Terjung

Erik, fier d’avoir un père mort au camp de concentration pour avoir été un combattant du front rouge, déteste son beau-père, mais découvre sur une photo abjecte, que lui montre l’inspectrice, qu’en fait son père a été pendu pour avoir collaboré. Menacé que la presse pourrait révéler ce fait, il finit par trahir son camarade et la rage qu’il en conçoit le conduit à un acte désespéré.

Le père de Kurt est devenu un personnage important de la politique locale - et un despote familial. Or, justement, il figure sur la fameuse photo parmi le groupe responsable de la pendaison. Quand il veut forcer son fils à recourir à un mensonge pour sauver sa situation, c’est la mère qui, derrière le dos de son mari, conseille à Kurt de fuir. Mais lors du passage à l’Ouest, Kurt est pris par la police et, contre toute attente, sauvé par son père.

Tom Gramenz et Ronald Zehrfeld; © Studio Canal Gmbh Julia Terjung

Quant à Theo, il découvre que son père, ouvrier dans le nouveau complexe sidérurgique (soulignons la présence incroyablement physique de Ronald Zehrfeld en sidérurgiste, dans une scène quasi documentaire filmé peu avant la fermeture du fourneau) et si fier que son fils va être le premier de la famille à passer le bac, avait participé trois ans plus tôt à la révolte de 1953. Il avait caché ce fait pour protéger son fils. Il y a un vrai amour dans cette famille, ce qui implique un vrai respect mutuel. Theo ne veut pas partir, il tient à sa famille, mais quand la situation devient intenable, la poignée de main entre lui et son père dit tout.

Les fils deviennent adultes en trouvant leur propre chemin et les pères, finalement, l’acceptent.

A part quatre filles, toute la classe est partie à l’Ouest entre Noël et le Jour de l’An, période où les contrôles étaient moins stricts.

Une bonne génération après la chute du mur, il est temps de s’intéresser à ce qui se passait derrière le rideau de fer à partir d’une perspective de l’Est et non tel que les gens de l’Ouest s’imaginaient l’Est -, de montrer des personnes en chair et en os, avec leurs contradictions, leurs rêves, leur foi (« il faut croire en quelque chose ») ou leurs désillusions.

Lars Kraume réalise ce film après Fritz Bauer, un héros allemand. Dans les deux cas il s’agit de comprendre comment l’Allemagne d’après-guerre a pu gérer son passé. Dans les deux cas il s’agit d’histoires réelles. Dans les deux films les gens ne parlent pas du passé. A l’Ouest on travaille, travaille, travaille pour construire une société du bien-être matériel, à l’Est on croit, ou veut croire, à un monde meilleur.

A part Burghart Klaußner qui joue le ministre, tous les acteurs adultes sont originaires de l’ex-RDA ce qui signe, entre autres, le souci d’authenticité du réalisateur. Il dit dans notre interview qu’il y a toujours des différences entre des personnes qui ont grandi à l’Ouest et ceux qui ont grandi à l’Est, notamment en ce qui concerne les souvenirs qu’ils ont des attitudes et de l’atmophère d’avant la chute du mur. D’ailleurs, l’auteur du livre, interrogé sur son ressenti après avoir vu le film, répond que « c’était exactement ça ».

Filmé dans des tons sépia pour marquer la distance, le problème reste pourtant universel : jusqu’à quel point une dictature peut-elle opprimer la soif de vivre de la jeunesse et jusqu’à quel point cette énergie juvénile peut-elle menacer le régime ? Ne reste-t-il que la fuite ? Le mur a été construit cinq ans après, en 1961…

Waltraud Verlaguet

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