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Berlin 2015, sélection officielle

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El Club ou la repentance impossible

Le film de Pablo Larraín est une exploration sans concession de la possibilité ou non de la repentance.

Les prêtres reclus dans cette maison misérable des bords de mer ont chacun leur poids de culpabilité hormis celui qui souffre d'une sénilité précoce. Même la religieuse qui les surveille et les protège recèle sa part d'ombre. Entre l'homosexuel, le compromis avec les crimes de la dictature militaire et le trafiquant d'enfants pour la bonne cause ne manquait plus que le pédophile avéré.

C'est par ce dernier que va arriver le scandale, par la dénonciation en pleine rue par une ancienne victime, Sandokan du père Lazcano. Le suicide de ce dernier va entraîner la venue du père Garcia dont la mission est de vérifier que les prêtres reclus depuis tant d'années ont compris la gravité de leurs actes et ont connu une forme de repentance. L'objectif étant de les réintégrer si possible s'ils ont fait acte de contrition et de repentance.

Aucun d'entre eux ne se reconnaît coupable de quoi que ce soit. Chacun expose tranquillement les raisons de ses actes dans un dispositif où le spectateur devient celui qui écoute l'exposé des arguments, des justifications voire des menaces.

Rarement un film n'aura eu une forme technique aussi cohérente avec son propos. Le traitement de l'image, la mise en scène de chaque dialogue comme la dramaturgie sacrificielle de la chasse à l'homme dans un processus typiquement du bouc émissaire nous place au cœur, non pas de l'action mais du dilemme moral du père Garcia.

Ébranlé dans ses certitudes, ce dernier n'est pas exempt d'ombres et les rapports pour le moins ambigu qu'il entretient avec la victime nous le montrent comme sur une ligne de crête sans jamais vraiment savoir de quel côté il va pencher.

C'est aussi un film sur les corps, le rapport de chacun de ces prêtres à son corps, tiraillés entre leurs désirs, sublimés ou non, en désir de violence subie ou infligée. Ou dépossédé de sa corporalité, et donc indifférent à sa propre déchéance comme Sandokan au point de trouver normal les abus qu'il dénonce.

Mais la violence est morale et définitive. C'est au sacrifice ultime qu'il faut consentir pour préserver la tranquillité de tous, une perte qui passera par le sacrifice de ce qu'ils ont de plus cher: non pas leur âme ni leur conscience mais leur chien. Parvenus au paroxysme de la violence, peut-être que Dieu peut pardonner mais il ne peut y avoir nul pardon humain et ils vont découvrir leur propre enfer quand ils seront contraints d'accepter celui qui est leur pire cauchemar parmi eux.

La force de Larraín est de ne jamais être dans le jugement explicite. Pourtant même s'il s'en défend et s'il a tenté d'exposer les motifs de façon neutre, revendiquant la liberté d'interprétation du spectateur, les atmosphères glauques et les regards en fuite induisent la condamnation à laquelle le témoin que nous sommes ne peut que souscrire.

Un film rare et d'une intensité extraordinaire dont les dialogues sont un fabuleux exercice de déni de toute forme de repentance.

Roland Kauffmann

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