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Manchester by the Sea ou l'anti-Caïn

« Qu'as-tu fait de ton frère ?», la question posée par Dieu à Caïn dans le livre de la Genèse (4,9-10) peut paraître surprenante à propos de ce magnifique récit de rédemption qu'est Manchester by the Sea de Kenneth Lonergan.

En effet, rongé par la culpabilité et sa responsabilité dans un drame qui a bouleversé sa vie et dont on peut vraiment dire que ce fut «la faute à pas de chance», le héros, Lee, se voit confronté à une nouvelle situation qui lui donne la possibilité de repartir à zéro, ou pas.

Son frère Joe, vient de mourir, laissant un fils et un bateau; une maison et une ex-femme toxique. Lee est alors attendu comme l'exécuteur testamentaire, à son corps défendant, des dernières volontés de son frère. Il doit quitter Boston, revenir à Manchester et devenir le père de substitution de l'adolescent qu'est Patrick. Il est véritablement "requis", sans que personne, ni le notaire, ni l'inaltérable ami de la famille, Georges, ne se demandent s'il lui serait supportable de vivre à proximité de Randi, son ex-femme, toujours amoureuse malgré le drame qui les a séparé.

La dépendance émotionnelle entre Lee et Joe est telle, Joe a toujours tellement été présent et décideur de tout que Lee n'a d'autre choix que de se résoudre à faire ce qui est attendu de lui. Et pourtant, dans cette scène d'anthologie lorsque dans cette rencontre avec Randi, il confesse «je ne peux le supporter», il exerce son entière liberté et sa pleine lucidité avec lui-même.

Sa culpabilité initiale est de l'ordre du destin, du fatum. Le drame est arrivé en raison de son insouciance, de sa légèreté, de son inattention à la vie. Il ne comprend rien et lorsque les policiers lui disent que ce qui est arrivé par sa faute aurait pu arriver à n'importe qui, qu'il n'a aucune responsabilité en rien, il ne lui reste rien d'autre à faire qu'à chercher à se supprimer, car ce qui est arrivé vient de «ce hasard qui frappe ceux qui vivent au hasard» (Montaigne 2/1).

Lee reprend son destin en main en trouvant des solutions inattendues. Au hasard aveugle qui lui a pris sa vie, à la volonté bien intentionnée de son frère, il va opposer ses décisions. Tout au long du film, de micro-décisions en résolutions, à travers de grandes hésitations (lorsqu'il ne sait plus par exemple où est garée sa voiture), il va prendre conscience de la nécessité de reprendre le contrôle de son existence tout en ne privant personne de sa propre liberté et de sa propre vie, laissant chacun prendre pleinement ses responsabilités.

Lee Chandler est ainsi un anti-Caïn, capable d'agir au-delà de la volonté de son frère, sans pour autant renier sa mémoire ni se plier à sa volonté. Il a vraiment fait ce qu'il fallait faire pour remplir sa mission et exercer son entière responsabilité à l'égard de ce frère qu'il aura fallu tant de temps à enterrer.

Roland Kauffmann

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