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Edito : mai 2016

Film d'auteur ou film de genre ?

Faut-il opposer film d'auteur et film de genre ? Je me posais cette question à l'occasion du dernier film de Jeff Nichols, Midnight Special, qui relève, au moins en partie, de la science fiction et dont nous avons débattu dans plusieurs groupes. La réaction de la plupart d'entre nous était très positive devant ce film à la fois fort et subtil mais certains ont émis, avec une pointe de mépris dans la voix,  ce jugement catégorique : "je n'ai pas aimé, je déteste la science fiction". 

Parce qu'un film est un thriller, un film fantastique ou un film d'épouvante, voire une comédie, devient-il indigne de l'attention d'un cinéphile ? Si l'on se tourne vers le passé, la réponse est évidemment non : de nombreux westerns figurent parmi les grands classiques du cinéma, il en est de même des films noirs américains des années 50 et les thrillers de Hitchcock sont portés au pinacle par les critiques. Si l'on se réfère à la production actuelle, la réponse est moins nette. Il est vrai que la plupart des films commerciaux qui font des millions d'entrées malgré de faibles qualités artistiques appartiennent à des genres très typés et qu'à l'inverse la plupart des films dits "d'auteur" sont moins facilement classifiables, sinon dans le genre assez vague du drame ou de la comédie dramatique. L'opposition entre films de genre commerciaux et films d'auteur est donc sans doute plus forte aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a cinquante ans. 

Mais peut-être aussi les films du passé ont-ils pris avec le temps une honorabilité auprès des cinéphiles que n'ont pas les succès récents. Pourtant de grands réalisateurs actuels ont réalisé des chefs d'oeuvre dans des films de genre. Que l'on pense à David Cronenberg, à Kyoshi Kurosawa ou à Jeff Nichols pour le fantastique ou à Martin Scorcese, James Gray ou Quentin Tarantino pour le film policier. Ce serait dommage de les ignorer en rejetant certains genres. 

Jacques Champeaux