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Alexander Fehling

Né le 29 mars 1981 (Berlin - Allemagne)

Extrait de sa filmographie

Entretien avec Alexander Fehling

dans le cadre de la manifestation Face to Face with German Films lors du Festival de Cannes 2017

par Waltraud Verlaguet

Sous la vidéo : la traduction de l'intégralité de la transcription de l'entretien.

La première partie aborde la problématique de la RDA.

Les parties proprement cinématographiques sont intégrées, ensemble avec des extraits des entretiens avec Ronald Zehrfeld, Volker Bruch et Louis Hofmann, dans une vidéo soustitrée.

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Waltraud Verlaguet : Bonjour, merci beaucoup pour votre disponibilité. Vous êtes né à Berlin-Est, vous étiez encore enfant quand le mur est tombé, comment avez-vous vécu cette période ?

Alexander Fehling : J’étais très jeune quand le mur est tombé, j’avais 8 ans, et je me souviens – ce sont des souvenirs d’enfants qui ont tous ceci en commun que je n’ai pas compris ce qui se passait. Mes parents me l’ont expliqué, bien sûr, mais je me souviens très bien de cette sensation d’incompréhension devant ce que je percevais comme une crise existentielle des personnes autour de moi. Les uns étaient devant leur télé, pleins de joie, d’autres pleuraient. Quand je suis retourné à l’école, j’avais une copine que je venais  chercher le matin d’habitude, et ce jour-là il y avait des gens qui sortaient des meubles de sa maison, et quand j’ai demandé où était Diana on m’a répondu qu’elle n’habitait plus là. Du jour au lendemain il y avait des personnes qui n’étaient plus là. Deux ou trois semaines plus tard nous avons passé la frontière, et ce dont je me souviens surtout, c’est l’odeur. Bien sûr, ce que je voyais aussi était différent, mais c’est surtout l’odeur qui m’a marqué. Plus de culture, d’autres fruits, une nourriture différente.

WV : Qu’est-ce qui a changé pour vous après la chute du mur, à l’école par exemple, est-ce qu’il y avait un genre de « rééducation » comme dans l’Ouest après la 2ème Guerre mondiale ?

AF : Non, je n’étais à l’école que depuis 2 ans, et j’ai pensé « j’aimerais être plus âgé pour comprendre ce qui se passe ». Et quand j’étais plus âgé j’étais content d’être encore si jeune. Pour moi il n’y a pas eu de grande déchirure dans ma vie comme pour tant d’autres – certains ont été carrément brisés.

WV : Andreas Dresen explique qu’il est arrivé juste au bon moment. Plus tôt ou plus tard, sa carrière aurait été terminée avec la chute du mur.

AF : Oui, c’est fou, certains artistes, acteurs, mais aussi d’autres professions, ont investi 20 ans de leur vie et du jour au lendemain, ce qu’ils avait fait n’était plus reconnu. C’était terrible.

WV : Et comment vous voyez la situation aujourd’hui ? Y a-t-il encore des différences entre Est et Ouest ?

AF : Moi personnellement je ne sens plus de différences. On voit que l’image de la ville change. Et parfois je me rends compte, quand je parle avec quelqu’un de mon âge qui a grandi à Berlin-Ouest, qu’on n’a pas les mêmes références, par exemple « quoi, tu ne connais pas ce livre d’enfants ? » - « J’ai grandi dans l’Ouest. » - « Ah, ok ». Ces sont surtout ces petites choses, mais avec d’autres générations on ne ressent pas de différence.

WV : Et sur le plan professionnel ?

AF : Là il n’y a aucune différence.

WV : Vous connaissiez Ronald Zehrfeld déjà au temps de la RDA ?

AF : Non, je l’ai connu à l’école de théâtre, quand j’étais en première année, lui était en quatrième année. C’est là que je l’ai vu pour la première fois. Plus tard nous avons tourné ensemble dans Wir wollten auf’s Meer (de Toke Constantin Hebbeln, 2012).

WV : Vous avez joué souvent des personnages très engagés, Andreas Baader dans Qui d’autre à part nous ? et Johann Radmann dans Le Labyrinthe du silence, chaque fois primé.  Est-ce que vous êtes vous-même engagé ?

AF : Que voulez-vous dire par ‘engagé’ ?

WV : Sur le plan politique ou …

AF : Je ne suis pas engagé politiquement de façon organisée, je n’appartient à aucun groupe ou mouvement. Je suis engagé dans ma petite sphère privée, pour des relations humaines entre les gens. Mais je dois avouer que ma conscience politique ne s’est développée que ces dernières années. C’est différent pour d’autres personnes, mais j’appartiens à ces gens qui sont très occupés par eux-mêmes dans leur jeunesse. A 18 ans, le monde dans lequel je vivais n’était pas si important pour moi que j’aurais eu le besoin de le questionner sans cesse. Je me suis surtout concentré sur mon projet de devenir comédien et ce qui m’a toujours intéressé c’est plutôt le tissu relationnel, la place de l’homme parmi d’autres hommes. Je commence seulement maintenant à regarder ça de plus près.

WV : Il y a un proverbe qui dit : « qui à 20 ans n’est pas communiste est un cochon, celui qui l’est encore à 40 ans est idiot ».

AF : il y a aussi la phrase : »il faut d’abord avoir une biographie avant de s’intéresser à celle des autres. »

WV : Vous êtes trop jeune pour vous souvenir de l’affaire Baader-Meinhof, mais est-ce que vous vous souvenez comment ça a été reçu à l’Est ?

AF : Non, pas du tout.

WV : Vous ne vous souvenez pas comment en général l’engagement communiste à l’Ouest était jugé à l’Est ?

AF : Non, du tout.Alexander Fehling WV : Dans In Zeiten des abnehmenden Lichts vous jouez Sascha. Comment vous voyez son attitude ?

AF : Bien, quand je joue un personnage comme ça je dois absolument éviter de le juger. Je cherche les motivations possibles, parfois on n’en trouve pas et il faut vivre avec le fait que ça reste un mystère. C’est ce qui rend la chose intéressante. Quand la façon de jouer est déterminée par ce qu’on sait du personnage ça devient vite ennuyeux et le spectateur s’en rend vite compte.

WV : Oui, mais le film est tourné, votre rôle est terminé.

AF : Oui, mais quand même. En tout cas ce n’est pas quelque chose qui me préoccupe, du genre « j’aurais dû faire ça comme ça » ou « ce n’est pas juste qu’il soit ainsi ». Ce n’est pas ma façon de penser.

WV : Vous avez écrit un scénario, The River used to be a Man (2011) ?

AF : Non, pas vraiment, mais je comprends d’où vient la question. The River used to be a Man est un film sans scénario. Le réalisateur, Jan Zabeil, et moi, nous sommes partis en Afrique pour y chercher quasiment notre histoire et nous avions pris un fil rouge qui était surtout mon idée ; le concept était de voir comment on se perd, intérieurement et extérieurement, nous n’avions pas de plan précis mais nous voulions quasiment nous perdre nous-mêmes. Nous étions quatre à partir et chercher notre film pendant des mois. C’est ainsi que j’ai été impliqué dans l’histoire.

WV : Est-ce que vous auriez envie de réaliser un film, de passer derrière la caméra ?

AF : Je peux me l’imaginer dans les années à venir. Mais je dois dire que j’ai beaucoup de respect devant la réalisation. Des acteurs font du sprint, mais les réalisateurs font plutôt de la course de fond, ils doivent avoir beaucoup de persévérance et de patience pour développer leur projet durant des années. Je crois que c’est assez compliqué et je me demande si je suis fait pour ça. C’est le premier point. L’autre est que je pense qu’il faut avoir quelque chose à raconter et ça se ressent si on l’a ou pas, du moins dans cette forme. On verra.

WV : Alors il ne me reste plus qu’à vous souhaiter bonne chance pour la poursuite de votre carrière.

AF : Merci beaucoup.

WV : Merci à vous.


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