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Le fils de l'autre

 de Lorraine Levy avec Emmanuelle Devos, Pascale Elbe, Jules Sitruk. France/Israël/Palestine 2012

Qui suis-je ? Qui es-tu ?

Les salles obscures sont souvent habitées par des films traitant du déchirement que connaissent ces populations soeurs, ces frères ennemis, palestiniens et israéliens, condamnés de toute éternité à vivre ensemble. Reconnaissons qu'il y a là, pour le cinéma, un matériau d'une infinie richesse, et qu'il n'est guère difficile d'y voir poindre une émotion dont le petit écran est friand, car elle est souvent son fonds de commerce. Mais c'est dire aussi que les risques sont grands de sombrer dans un "sentimentalisme" qu'on pourrait qualifier de contre-productif. Le film réussi est celui qui parvient à echapper à cet ecueil, et Lorraine Levy y parvient, aidée en cela par un thème qui lui interdit de prendre parti. Ainsi planté le décor, nous voici immergés dans une histoire qui atteint aux limites extrêmes du drame vécu, au jour le jour, par ces populations douloureusement face à face.

A chacun son camp

Voici deux familles chacune d'un bord, chacun vivant avec avec son petit bonheur quotidien, en dépit du contexte : l'animosité, pour ne pas dire plus, est tellement ancienne ! De part et d'autre, des ados ; l'un d'eux, Joseph, fils d'un officier juif de stricte obédience ,va epouser la profession du père, on le devine par conviction. Sa foi en un sionisme pur jus n'y est pas etrangère. L'autre ado, Yassine, le palestinien, fils d'un modeste artisan en mécanique, fait la fierté des siens, promis à de brillantes etudes en médecine, après un baccalauréat qu'il vient de réussir à Paris. Survient dans ce petit monde le grain de sable, si ce n'est le coup de tonnerre. A la faveur de la visite médicale d'incorporation - de routine! - il s'avère que le groupe sanguin de Joseph n'est pas compatible avec celui de ses géniteurs. Via la recherche d'ADN qui s'ensuit, et l'enquête approfondie qui en résulte, il y a eu, 18 ans plus tôt, à la maternité d'Haiffa, échange malencontreux de nouveaux nés, ceci à la faveur des bombardements qui avaient touché la ville, et de la panique qui en avait résulté. L'évidence est là : Joseph n'est pas né de parents juifs, Yassine n'est pas palestien.

Voix du sang ? Voix sans issue ?

Commence alors pour les deux familles, séparément puis peu à peu en commun,un douloureux "chemin de croix" - si l'on veut bien accepter cette image - dans ce décor. D'abord, se refuser à l'evidence : semblable événement survenu dans un pays "normal", aurait fait son petit bonhomme de chemin... Imaginez ici,dans le contexte que l'on sait... Survient la confrontation douloureuse,très digne à l'hopital d'Haiffa. Les parents côte à côte, pétrifiés, s'ignorant, étrangers. Que peuvent les excuses prodiguées par l'administration ? Les pères l'un après l'autre, quittent les lieux, s'eloignent, anéantis par l'evènement. Cette séance est insupportable, qui pour chacun remet en question toutes choses. Et Bilal,le frère de Yassine, exhale la déchirure qu'il ressent, vis-à-vis des copains, vis-à-vis de tous, car son propre frère est devenu son pire ennemi. Quant à Joseph, au terme d'un long prône emouvant du rabbin, le voici désorinté : "Je n'ai plus le droit de me sentir juif,et je ne me sens arabe"..... Mais il faut tenter de vivre et le pas à pas des rencontres le permettra. Apprendre peu à peu à accepter l'inacceptable.

Une fable ... face à l'histoire

Et puis, il y a les mères. Est-on ici si eloigné des "matres dolorosae" de Salomon ? Comment ne pas aimer le fruit de ses entrailles - et celui qu'on a bichonné si longtemps ? Est ce le sang qui fabrique paternité et maternité, ou le fait d'accompagner les premiers mots, les années d'enfance et d'adolescence ? Lorraine Levy, comme on pouvait s'y attendre, se garde bien de nous dire de quoi va "accoucher" ce qu'on répugne à qualifier d'aventure : au moins a-t-elle le mérite de faire réfléchir sur bien des questions, au delà des convulsions israélo-palestiennes d'aujourd'hui.

Jacques Agulhon

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