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Les autres contributions en ligne pour cette journée :

le détail des plans
l'analyse structurelle
Compte-rendu du groupe 1
Compte-rendu du groupe 2
Compte-rendu du groupe 3
Comparaison des méthodes de travail groupes 2 et 3
la méditation sur ce film


Cours Théologie et Cinéma à la Faculté de Théologie Protestante de Montpellier

Montpellier 23 nov. 2014
Les éléments structurels du films

Quelques éléments d'analyse permettront de dégager des pistes qui seront ensuite explorées lors de la méditation sur ce film.

Remarquons que dans cette exemple, nous n'avons pas analysé la bande son ! Cela sera un des travaux futurs.

Nous nous concentrons ici sur l'analyse des plans (Voir  : le détail des plans ), regroupés en séquences (unité narrative), et la façon dont celles-ci sont montées, ainsi que les cadrages et les couleurs.

1. Le montage

Une moyenne de 4,66 sec./plan est très confortable pour le spectateur : ni haché ni ennuyeux.

2. La structure du film

Résumé

Un prologue en flashforward situe d’emblée la nature de la relation entre Driss et Philippe, celle d’une amitié complice.

Celle-ci est dans la suite déployée dans le temps :

  1. Driss est montré dans son milieu ;

  2. Driss est embauché et apprend le métier de garde-malade ;

  3. Driss prend ses marques dans ce nouvel univers ;

  4. sa famille se rappelle à lui à travers un larcin du petit frère/cousin ;

  5. Driss a de plus en plus d’impact sur Philippe ;

  6. ils ont cependant chacun leur jardin secret :
    • Philippe ne veut pas laisser participer Driss à sa rencontre avec Eléonore
    • Driss regarde sa mère travailler le soir ;
    • Philippe surprend une discussion de Driss au téléphone, essayant de régler le problème de son frère ;

  7. chacun est à nouveau confronté à ses problèmes ;

  8. Driss revient vers Philippe, mais en tant qu’ami, appelé au secours par Yvonne :
    • reprise des images du début ;
    • happy end.

2a. Liste des séquences

séquence n° nb plans durée moyenne remarques
* après la virgule, non sec, mais centièmes de minute
prélude
1 le pari 116 3,82 flashforward
Driss et son milieu
2 l'entretien d'embauche 83 3,59
3 Driss et les enfants 26 4,40
4 Driss et sa mère 24 5,59
5 Driss et les jeunes 13 6,64
installation et apprentissage
6 l'embauche 30 4,92
7 démonstration soin 16 3,46
8 Driss s'installe 5 5,28
9 1er jour de travail : soins 35 5,73
10 repas dans la cuisine 10 3,93
11 repas du soir sur le toit 8 4,60
12 Driss regarde Magalie 5 3,26
13 soin: Philippe ne sent vraiment rien 11 3,98
14 travail de courrier 10 3,83
15 "repas à l'œil" 6 2,77
16 lecture et téléphone 3 5,04
Driss bien dans la place, prend ses marques
17 Driss au bordel 2 4,48
18 Driss au bain 9 5,92
19 Un voisin peu respectueux 20 4,26
20 Au musée 32 3,52
21 Mise en garde de l'ami 21 5,33 La 'famille' de Philippe se rappelle à lui
22 Drague baignoire 21 3,33
23 Courrier de cœur/Yvonne+ Driss mangent 22 4,77
24 Crise 22 7,43 1ère crise
25 rue 29 4,96
26 Au restaurant 44 5,45
retour de la famille
27 Driss et sa sœur 19 3,93
28 Driss et son frère commissariat 5 8,31
Impact de Driss sur Philippe
29 amour à distance 57 3,70
30 à l'opéra 38 4,33
31 bibliothèque 10 4,32
32 Driss peint 11 2,25
33 Driss en colère 30 3,00
34 Driss peint 2 4 4,56
35 activités diverses sur fond muscical soins 8 2,08 fonctionne comme un résumé
peint 1 3,12
habillage 3 2,39
soignante 2 4,34
peint 2 1,66
couturier 1 3,48
courrier 2 0,82
neige 4 2,18
36 Philippe sermonne sa fille/Driss peint et entend 8 2,15
37 danse toit 1 3,32
38 Le tableau 7 3,91
39 footing 1 9,32 unité narrative
40 à l'atelier 2 4,34
41 chaise boostée 4 2,92
42 Au bordel 5 5,04
43 escalier 1 5,68
44 A la bijouterie 6 9,21
45 le concert d'anniversaire 21 4,55
46 Le chagrin de Lisa 29 3,16
47 Négociation du tableau 7 5,59
48 Confidences Yvonne et Driss 16 2,94
49 la fête 73 3,23
50 La photo 20 4,31
51 Essais d'habillage 11 4,58
52 Dris attrape Bastien 3 12,80
Prise de distance
53 L'attente au café 7 5,86 Montage parallèle
54 Driss regarde sa mère laver les vitres/Philippe au téléphone 23 5,31
55 départ en jet 21 7,8
56 Parapente 43 3,48
57 Driss+frère 24 3,57 La famille de Driss se rappelle à lui
58 Confidences de Driss 41 5,18
59 Les croissants 5 4,13
60 Le départ de Driss 30 7,06
Driss et Philippe retrouvent chacun leur condition
61 retrouvailles 10 7,20
62 le nouveau 8 8,85
63 Retour à la cité 12 4,22
64 Philippe et le nouveau 13 2,80
65 Au pôle emploi 20 4,27
Driss revient vers Philippe, non comme employé, mais comme ami
66 crise 2 7 4,46 2e crise
67 Driss retourne chez Philippe 10 5,07 au centre de cette séquence, la poursuite de la séquence 1.
68 Philippe reçoit une nouvelle beauté 49 5,69
69 au restaurant à Dunkerque 18 8,85
70 épilogue 5 41,58

2b. Déroulement linéaire

Si on inscrit ces séquences sur la flèche du temps, on voit que l’ensemble est organisé autour de l’irruption des problèmes familiaux dans l’univers nouveau de Driss :

La bande du haut du tableau suivant indique sur quelle partie du film les différents groupes ont travaillé.

Remarquons une particularité technique : au lieu de reprendre simplement une partie des images du prologue, la séquence de la poursuite, quand elle est reprise à la fin du film, l’est sous forme de bribes, entrecoupées de noirs. Normalement, ce sont des souvenirs qui sont montrés sous forme de bribes, alors qu’ici, si c’est un souvenir pour le spectateur, c’est de l’action en train de se passer qu’il s’agit. Alors que nous avons à faire à une séquence de poursuite de voiture à grande vitesse, cela produit pourtant un effet de rêve, de détente, la musique aidant. Le spectateur participe ainsi à la détente progressive de Philippe, non seulement parce qu’il sait ce qui va se passer, mais par ce montage quasi-méditatif.

3. Le cadrage et les couleurs

Les personnages principaux sont Driss et Philippe. L’un est un jeune noir des cités, juste sorti de prison. L’autre un bourgeois richissime mais tétraplégique. Tout les oppose. Voyons comment ils sont mis en image.

3a. D’abord les couleurs :

Tout dans l’univers de Philippe est doré, or parfois accompagné du rouge cossu des beaux théâtres. Même quand Philippe attend son rendez-vous dans un bar, ce sont les couleurs dorées chatoyantes qui dominent.
Quand Driss prend connaissance de ses conditions de travail, il réalise qu’il pourra vivre dans cet univers et vous vous rappelez sûrement la scène de la baignoire. L’or est depuis toujours le symbole de la richesse, les couronnes des rois sont en or – mais vous conviendrez qu’on aurait pu montrer cette richesse autrement. Dans beaucoup de films les riches vivent dans des appartements aux couleurs claires et sobres. C’est que l’or ici est plus qu’une couleur, il est un symbole. On disait de Crésus que tout ce qu’il touchait se transformait en or. On peut dire de Philippe que tout ce qui l’entoure est fait d’or. Il vit littéralement dans de l’or.

Sauf : sa maladie. Là, tout est blanc. Le blanc est traditionnellement relié à la médecine, mais ce n’est pas une nécessité. On peut désinfecter une surface dorée aussi bien qu’une surface blanche. Les blouses des soignants sont blanches par convention – en bleu ou en vert elles pourraient être tout à fait aussi propres. Le blanc est donc un signal ici : attention : maladie ! Et Philippe ne supporte pas de se voir traiter en malade. Il l’accepte au moment des soins, il faut bien, mais quand les nouveaux auxiliaires de vie viennent en blouse blanche, il se met en colère. Et quand le nouveau, en blouse blanche, lui sert du café dans une tasse blanche, posée sur un napperon blanc – c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

La famille de Driss est dépeinte en couleurs vives bariolées, qui correspondent à l’idée qu’on se fait de l’Afrique. C’est coloré, c’est bruyant, les échanges sont tout sauf chatoyés.

Driss seul est pratiquement toujours montré dans des couleurs bleues. Pour certaines images on pourrait dire que c’est parce que c’est la nuit. Mais premièrement on peut parfaitement filmer la nuit sans qu’elle apparaisse bleue. Et deuxièmement Driss apparaît en couleur bleue même quand l’univers ne s’y prête pas, comme sur l’image où il est contre la fenêtre de la salle à manger de sa famille qui, par ailleurs, nous l’avons vu, est montrée en couleurs vives. La dernière image de cette diapo montre Driss mélancolique. En anglais on dirait qu’il a le « blues ». Ce bleu-là est donc également un symbole plus qu’une couleur.

Regardons en prime le départ de Driss et Philippe en avion. Il fait nuit, l’avion paraît bleu. Quand Philippe et Driss prennent leurs sièges, les parois latérales paraissent bleu-clair. Driss derrière l’hublot est dans un avion bleu. Puis l’avion prend de la hauteur, et Driss et Philippe avec lui. Et – miracle, les mêmes parois paraissent dorés – et puis c’est l’apothéose : l'or se fait céleste.

La nature est verte comme il se doit et le ciel est bleu – cela ne va nullement de soi. Dans des films portugais par exemple je suis souvent surprise comment ils arrivent à montrer des extérieurs en plein soleil dans des couleurs aussi fades, grises – pour exprimer la tristesse de la situation…

Les codes symboliques des couleurs sont donc parfaitement respectés. Cela aussi est rassurant. Le spectateur comprend d’emblée. Il est à l’aise dans l’univers qu’on lui montre, même quand ce n’est pas forcément le sien. Il n’est déstabilisé par aucun trublion symbolique.

3b. Le cadrage :

Philippe dicte à Magalie. Elle est assise plus bas – ce qui est déjà étonnant quand on prend une dictée. Du coup, elle est montrée en plongée, tandis que Philippe est en contre-plongée. On pourrait dire que ce sont les circonstances du lieu qui font qu’elle est simplement assise plus bas. Mais c’est surtout une façon de symboliser les rapports sociaux.

Yvonne et Driss mangent à la même table, Driss est plus grand qu’Yvonne, il devrait donc à priori apparaître au moins à la même hauteur qu’elle. Mais il est avachi, tandis qu’elle se tient droite, il est filmé en plongée, elle en petite contre-plongée. La même chose répète lors de la fête.
C’est suffisamment discret pour ne pas sauter aux yeux, mais cela transmet un message : la hiérarchie sociale est sauve. Chacun est à sa place.

Remarquons que dans la suite de l’histoire, Driss est plusieurs fois à la même hauteur que Philippe.
Au bar, il est avachi sur son siège, donc objectivement plus bas que Philippe, pourtant, dans le champ-contrechamp qui suit, il est filmé en légère contre-plongée.
Quand Driss pousse Philippe dans sa chaise, il est normal qu’il soit plus haut que Philippe. C’est quand les deux pourraient être à la même hauteur et qu’ils sont filmés avec un petit décalage, que c’est porteur de sens.

A partir de maintenant, Driss est montré comme ami et non plus comme subordonné.
A l’opéra et au bordel, ils sont à la même hauteur.
De même dans la scène du prologue mais qui se situe plus tard dans le fil de l’histoire.

Le changement de statut de Driss est donc exprimé très subtilement par le cadrage.

Lors de l’entretien, où se décide le départ de Driss, ils sont bien à la même hauteur, mais Philippe est dans la lumière, Driss dans l’ombre. Ce n’est pas parce qu’il est noir qu’on n’aurait pas pu placer une lampe de telle sorte qu’il soit éclairé. Or, la seule lumière vient sur Philippe.

Ces subtilités ne sont pas anodines. Ils font passer des messages subliminaux au spectateur.
Vers le haut

Waltraud Verlaguet

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