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Le désert, c’est d’abord un décor et un milieu

Séminaire 2007

DESERTS....

... tout lieu inhabité... 

(géographie): zone très sèche, aride et inhabitée.... déserts froids, déserts chauds.... Dans la mesure où nous nous sommes appuyées uniquement sur des fictions, en excluant les documentaires, il y a toujours des hommes dans ces déserts, dont l'histoire nous est racontée. La distinction entre la première approche (le désert comme décor de fond ou lieu de vie) et la deuxième approche (le désert comme milieu hostile) n'a pas toujours été facile. Dans nos extraits il y aura forcément des interférences. 

PREMIERE approche: Le désert comme décor de « fond » ou lieu de vie 

1. Sept chants de la toundra (un film de Markku Lehmuskallio, 2000, consacré aux Nénets, peuple proche des Inuits, disséminés dans les régions polaires du nord-ouest de la Sibérie) 

Il n'y a guère que "La fiancée" qui peut rentrer dans le thème. Il s'agit donc d'une histoire de jeune fille qui refuse le prétendant qu'on lui propose au profit de 3 domestiques de sa mère. Et bien sûr ça tourne mal. L'essentiel de ce récit donne lieu à des prises de vue d'un "désert" enneigé où les protagonistes se meuvent très à l'aise car c'est leur milieu naturel. C'est donc bien le désert comme décor de fond, et là c'est un désert froid. On entend le bruit du vent, les pas sur la neige. On voit des horizons à l'infini. Le désert est un espace que l'on parcourt. 

2. La prisonnière du désert (un film de John Ford 1956) 

Le plus beau western de John Ford, tourné dans les décors naturels de Monument Valley, haut lieu des religions indiennes, situé dans l’Arizona.
Plateaux et plaines désertiques s’étendent jusqu’au Mexique. Les héros du film errent dans tout le pays à la poursuite des Comanches. 
C’est une terre désertique mais grandiose. C’est le paysage classique du western. Mais c’est l’aspect territorial qui nous intéresse, l’enjeu de toutes les guerres entre blancs et indiens. (2 cultures, 2 identités). 

Dans ce décor chevauchent les deux peuples ennemis. Les indiens surgissent des rochers, ils escortent les blancs qui vont leur échapper, sur une musique inspirée des rythmes peaux-rouges. Mais avant ça, l’image, la première que Ford nous offre de ce désert, au tout début du film : Le passage du noir absolu à la lumière éclatante de l’extérieur : un lent travelling suit une silhouette qui ouvre la porte et laisse découvrir un paysage saturé de soleil… Ce passage d’un lieu obscur et rassurant à la « sauvagerie » extérieure se retrouve à plusieurs reprises dans le scénario du film : les grottes où vont se retrouve à plusieurs reprises dans le scénario du film : les grottes où vont se cacher les fugitifs et dans la dernière image, en rappel de la première. Lorsque tout le monde rentre à la maison, seul Ethan, vu de l’intérieur dans l’encadrement de la porte s’enfonce dans le paysage d’où il est arrivé – léger ralenti dans la démarche, déhanchement, force verticale sur l’horizon du désert – la porte se referme et le noir envahit l’écran.

3. La captive du désert (un film de Raymond Depardon 1989) 

Le désert est évidemment omniprésent de bout en bout dans ce film. Mais il n'est pas qu'un décor. Il est un lieu de vie pour les indigènes de la caravane mais aussi pour Françoise Claustres. Ce film illustre parfaitement le thème "des hommes vivent dans le désert". Et ce lieu de vie est naturel pour eux. Pas d'extrait à montrer. 

4. Lawrence d’Arabie (un film de David Lean - Musique de Michel Jarre - 1962) 

Des paysages à "perte de vue": chaque fois qu'un personnage approche, on le voit de très loin comme un point minuscule avec même l'impression qu'il "flotte" sur l'horizon, lorsqu'il se rapproche. Plus loin lors d'un échange avec Fayçal sous sa tente, Lawrence comparera le désert à une mer que les rames ne pénètrent pas : "Le désert est un océan où l'aviron ne s'enfonce pas. Et sur cet océan le bédouin va où il lui plait et il frappe quand il lui plait. C'est ainsi que le bédouin s'est toujours battu". 

Le désert comme milieu "autre", étranger, auquel il faut s'adapter. 

Avant le départ de Lawrence vers Fayçal le désert est annoncé comme une "fournaise de feu". Au début du voyage de Lawrence vers Fayçal, lever du soleil sur le désert et vues très la rges sur celui-ci (12.40) avec deux personnages cheminant sur des dromadaires, comme "perdus" dans le désert. Thème musical que l'on retrouvera fréquemment sur ces plans larges du désert. Apparition du thème du désert comme "territoire" spécifique auquel l'homme doit s'adapter. D'où le désir de Lawrence de se conformer strictement au comportement de son guide bédouin. Evocation de l'eau à ne pas gaspiller : Lawrence ne boira que lorsque son guide lui-même boira. Plus loin scène auprès du puits ( 21.12) Nuit dans le désert : ciel étoilé. Montage DVD Arielle chap. 1 de 0'00 à 3'26 

5. Le patient anglais (un film de Anthony Minghella 1997) 

Dans ce film, le désert africain du Sahara est un décor exotique, théâtre d’un amour romanesque et tragique, situé dans l’histoire de la Seconde guerre mondiale. Le désert est un environnement qui provoque le désir, l’attraction entre ces deux êtres. Notre premier extrait a pour thème l’exploration du désert, qui permet de découvrir le décor souterrain, l’envers inconnu du vide actuel : Dans ce passage les grottes sont le témoignage d’une époque antérieure où le désert n’était pas désert. Les peintures rupestres sont la preuve d’une vie humaine heureuse et florissante. Elles renvoient les deux communautés présentes, arabes et européennes à un passé lointain, inconnu. Ce sera aussi le décor du drame amoureux où la mort attendra la femme abandonnée par le destin. 

DEUXIEME approche: Désert comme lieu de vie et milieu hostile, difficile, où des hommes ont développé des techniques de survie plus ou moins efficaces 

1. La captive du désert (Depardon) 

Certes le désert y est un milieu difficile mais ce n'est point tant cette difficulté qui y apparaît que la parfaite adaptation de ceux qui y vivent. Tous les comportements et les gestes de la vie quotidienne découlent de cette parfaite intégration des problèmes posés par la chaleur, la pénurie d'eau, la marche difficile, les étendues immenses. Et l'étrangère (F. Claustres) ne sert que de révélateur, par contraste, de cette intégration. Si elle est captive c'est en grande partie parce qu'elle est étrangère au lieu. 

2. Les Dix Commandements (un film de Cécil B.DeMille 1956) 

Un morceau d'anthologie lorsque Moïse, chassé d'Egypte, affronte le désert. Une voix-off souligne lourdement tous les dangers encourus dans ce milieu hostile et toutes les souffrances endurées par celui qui s'y trouve. Moïse (Charlton Eston) sur-joue par rapport à ces épreuves (la soif, le vent, la solitude...). Il sera intéressant d'opposer cette vision des choses à celles plus épurées (et c'est un euphémisme) présentes dans "Le fils du désert", Dersou Uzala ou Lawrence d'Arabie. 

Scène 22 de 1h, 39' 51'' à 1h. 42', 34''  

3. Le fils du désert (un film de John Ford 1948) 

Le désert, horizons larges et dégagés comme lieu où il est difficile de se cacher mais où les poursuivants répugnent à vous suivre. Le désert pays de la soif. Le sable du désert comme page d'écriture et réceptacle d'empreintes. Le désert actif dans son oeuvre de désolation : le vent, la tempête de sable, les empreintes de pas. Très belles images où les personnages luttent contre la tempête en contre-jour. Le désert de pierres. Les techniques de survie (cactus barrique). Le désert, lieu où l'on meurt (tombeau de la jeune femme après son accouchement, corps du Kid, puis de Pedro). 

Premier extrait : Trois bandits en fuite sont piégés dans le désert de Mojave, à la frontière du Mexique. Dans le désert il est difficile de se cacher mais l’avantage c’est que les poursuivants répugnent à vous suivre. C’est le pays de la soif. La soif est une arme pour leurs poursuivants et pour eux un handicap qu’il faut surmonter avec les moyens du bord. Ici le décor prend toute l’image, parfois sans personnage. Le désert est actif : du sable comme réceptacle d’empreintes, comme page d’écriture où on peut dessiner et dresser un plan. Ford filme la nature, le vent, la tempête de sable. Il utilise le contre-jour, la contre-plongée pour mieux isoler l’être humain. Héros et chevaux semblent vaincus par les éléments. 

Deuxième extrait : Les bandits découvrent une roulotte où va accoucher une femme seule. Nous n’avons pas résisté au plaisir de signaler à nouveau cette image du désert vu de l’embrasure d’un lieu clos, ici la roulotte et son ouverture voûtée comme celle d’une église. Dehors il n’y a que la désolation d’un arbre sec. Séquence suivie d’une petite recette de survie ou comment utiliser le cactus barrique. 

Troisième extrait : Autre paysage du désert. De loin cela ressemble à de l’eau, une étendue blanche et scintillante. Mais c’est du sel ! Un désert de sel, craquant sous les pas comme la neige et éblouissant pour les yeux. 

4. Dersou Uzala (un film de Akira Kurosawa 1977) 

Un capitaine (russe) chargé de faire des repérages topographiques dans une région perdue de Sibérie, rencontre un homme du pays Dersou Ouzala, qui va l'accompagner (et le guider) dans ses pérégrinations. L'extrait choisi nous les montre perdus dans un désert glacé au silence menaçant. Le vent efface les traces. Le désert comme lieu où l'on se perd. On assiste à la manière dont Dersou et le capitaine vont se tirer d'affaire pour échapper au froid et au vent glacial de la nuit : couper des roseaux et les rassembler pour "construire" une cabane protectrice grâce au trépied que le capitaine transporte pour supporter ses instruments de mesure. "L'homme est trop faible devant la grandeur de la nature". Lutte pour la survie physique. Thème de l'homme occidental insuffisamment apte à se tirer d'affaire dans cet univers malgré ses équipements "modernes". On retrouvera ce thème ailleurs. Et c'est l'homme qui a toujours vécu dans ces lieux et avec des moyens élémentaires qui peut assurer sa survie. Très belles images de brume, de soleil (ou lune ?). Avancer ou mourir. 

De 38 min. à 59 min. 

5. Lawrence d’Arabie 

Question latente : comment se diriger dans le désert ? Soit en étant un homme du territoire (les bédouins) soit en disposant d'outils comme la boussole. 

La traversée du désert vers Akaba (à partir de 54.31). Le désert comme espace immense à traverser : plans très larges, personnages minuscules, musique implacable... Solitude de l'homme perdu dans le désert (celui que Lawrence sauvera). Le désert à "perte de vue". 

La traversée du Sinaï (à partir de 1h47) : la tempête de sable... les sables mouvants et la mort d'un des jeunes "serviteurs". 

Deuxième extrait : Lawrence a convaincu le Prince Fayçal de traverser le désert de Nefoud (dans la Jordanie actuelle) pour atteindre Akaba et prendre la ville alors aux mains des Turcs. Lors de leur première rencontre, Fayçal lui dit : « Vous devez être un de ces anglais amoureux du désert ! Aucun Arabe n’aime le désert. Nous aimons l’eau et la verdure. Il n’y a rien dans le désert et personne n’a besoin de ce qui n’est rien. » Lors de cette traversée tous les dangers du désert sont présentés avec réalisme. Images et dialogues sont d’une sobriété très efficace. On assiste à des phénomènes météorologiques typiques (mini tornade). 

Je veux signaler deux choses : la musique de Maurice Jarre : Il y a le thème principal reconnaissable, un peu emphatique et une musique contemporaine, typique des années 60 qui illustre la chaleur implacable du désert. 

6. Le patient anglais 

Dans le désert parcouru par les héros de ce film l'introduction des outils de la modernité (camions, avions) ne met pas totalement à l'abri des dangers du désert (tempête de sable, perte de son chemin...). On retrouve donc les mêmes problèmes que dans les autres films : se perdre, être submergé par la tempête de sable, souffrir de la soif... C'est la séquence de l'accident de camion et de la tempête de sable. Chap. 7 : l'accident jusqu'à la tempête de sable jusqu'à chap. 8 (1.02.10).

7. Atanarjuat (un film de Zacharias Kunuk 2001) 

La difficulté de ce milieu de vie (désert glacé) est présente en permanence mais aussi l'adaptation de ses habitants à ses caractéristiques. C'est donc à rapprocher de "Lawrence d'Arabie" mais aussi de "La captive du désert" à propos de la première approche. Ce qui est plus original c'est le thème du désert milieu de vie où les forces spirituelles s'exercent. Le chamanisme y est présent et la scène de la poursuite d'Atanarjuat par ses trois adversaires, sur la banquise illustre ce propos. On y voit un personnage surgir d'on ne sait où (et qui est probablement l'esprit du chaman) intervenir pour indiquer à Atanarjuat quel chemin prendre pour éviter les pièges de la banquise et pousser les poursuivants dans la crevasse. Cette dimension spirituelle du lieu n'est pas métaphorique. La spiritualité est la nature elle-même. 

Du point de vue géographique l’action se situe sur la banquise canadienne. Une couche de glace recouvre la mer arctique qui s’étend de l’île d’Igloolik à celle de Siuraq. Une large crevasse de 10 mètres s’étend sur une dizaine de kilomètres. Cette crevasse constitue une barrière infranchissable. Ce n’est pas la rudesse du lieu ni l’adaptation de ces habitants à ce milieu qui nous a intéressé ici. L’originalité c’est la présence des forces spirituelles qui exercent dans ce désert glacé. 

La scène choisie nous montre l’esprit d’un premier chaman (mort au début du récit) qui va apparaître aux 3 poursuivants d’Atanarjuat qui viennent d’assassiner son frère. Il leur dit : « Le frère aîné d’Atanarjuat est à vos trousses » alors qu’il est mort et la stupeur des trois hommes va permettre à Atanarjuat de s’enfuir. Le deuxième esprit est celui d’un chaman vivant (celui qui va le recueillir et le soigner). Il lui donne une force surhumaine en l’incitant à sauter par-dessus la crevasse. Ce même esprit va troubler Uqi (l’ennemi) en l’encourageant à continuer et provoque sa chute.

L’histoire s’inspire d’une légende vieille de cinq siècles. Le Chamanisme y était tout-puissant. Le chaman, médiateur entre le monde des humains et celui des esprits, tient ses pouvoirs des esprits auxiliaires (parent décédé ou amulette animale). Chaque espèce animale, chaque élément de la nature (les vents, l’eau, le soleil et la lune) était gouverné par un esprit maître qui pouvait devenir l’auxiliaire du chaman. Toute la cosmologie des Inuits est présente dans ces paysages. Cette dimension spirituelle du lieu n’est pas métaphorique – la spiritualité est la nature elle-même. 

Le réalisateur dit que filmer le phénomène du chamanisme était pour lui une façon de le rendre visible. Du point de vue technique, il est intéressant de dire que le tournage ne pouvait pas se faire sur un support normal, vu les conditions extrêmes. Il est filmé en bétacam (16/9°) transféré ensuite sur pellicule 35 mm. Ce qui permet au spectateur de se sentir au cœur de l’action.

Maguy Chailley et Arielle Domon,

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