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Réalisation : Alain Resnais ; Scénario : Alex Réval, Laurent Herbiet ; Image : Eric Gautier ; Montage : Hervé de Luze ; Distribution France : Studiocanal
Avec :
Sabine Azéma - Pierre Arditi - Anne Consigny - Lambert Wilson - Mathieu Amalric - Michel Piccoli. (Les acteurs jouent leur propre personnage).
Alain Resnais est né en 1922. Il a commencé en 1947 comme acteur (un page) en 1942 dans Les visiteurs du soir de Marcel Carné. Assistant-réalisateur et producteur en 1946, il ne connaît les succès qu’en 1959 avec Hiroshima mon amour. L'Année dernière à Marienbad, en 1961, comme Mon oncle d’Amérique en 1980, Smoking, no smoking en 1993, et plus récemment Les herbes folles en 2009 furent salués par la critique mondiale. Loin d’être classique, son style reflète la préoccupation de rendre davantage des impressions ou des mécanismes psychologiques.
Résumé :
Un petit groupe d’acteurs et actrices à la fois de théâtre et de cinéma sont conviés par le majordome d’un ami commun dramaturge, à se retrouver dans sa riche demeure à la suite de son décès. Ils sont invités à juger l’interprétation, par une jeune compagnie, d’Eurydice, une pièce de théâtre écrite par le défunt.
Analyse :
A quatre-vingt-dix ans Alain Resnais est un réalisateur français toujours très novateur. Vous n’avez encore rien vu ne détonne pas dans son œuvre car ce film, fait pour nous étonner, perturbe les codes habituels de la narration. « Ce que je cherche toujours dans mes films, c’est une langue de théâtre, un dialogue musical qui invite les acteurs à s’éloigner d’un réalisme du quotidien pour se rapprocher d’un jeu décalé », dit Resnais. Il a choisi pour ce film l’Eurydice de Jean Anouilh et s’interroge en particulier sur la mise en scène au théâtre et au cinéma. Il utilise comme un jeu de miroirs imbriqués, un emboîtement de poupées russes, dans une démultiplication de l’espace, du récit et des acteurs.
Tout d’abord, les invités et le majordome du défunt sont assis dans une vaste salle sombre pour visionner la vidéo d’une répétition de la jeune troupe. La scène est celle du théâtre cadrée par la vidéo dont la caméra a dû être placée de face. Pour montrer les acteurs assis dans de confortables fauteuils anthracite, la caméra du réalisateur nous fait donc opérer un demi-tour. Elle devient mobile, peut faire des gros plans pour capter leurs expressions, les suivre dans leurs déplacements. Cette mise en scène minimale fait un peu penser à celle de Lars von Trier dans Dogville (Danemark - 2003). Le passage de la salle au film, au contraire de celui de l’écran à la salle, se fait imperceptiblement, dans le mouvement, au cours des déplacements des acteurs qui entrent dans un décor conçu pour le récit. C’est du cinéma. A chaque changement d’espace correspond une reprise du texte par les acteurs qui s’en saisissent, se l’approprient et se le renvoient, plusieurs fois répétés, jusqu’à aboutir dans l’expression filmique. Le texte d’Anouilh ne sort pas affadi de ces répétitions mais en acquiert une sorte de liant en volant de bouche en bouche dans un élan irrésistible. Les comédiens le miment d’abord dans le salle puis le jouent dans le contexte des décors, laissant paraître chaque fois, dans les émotions, un naturel qui prouve la maîtrise qu’ils ont de leur art.Et comme « vous n’avez pas encore tout vu », les personnages grâce à la constance de leur amitié obtiennent le ‘retour’ de leur hôte. Cette apparition (comme celle d’Eurydice devant Orphée), sera suivie de sa perte : il disparaît, dans une grande solitude, au petit matin, englouti par les eaux d’un étang.
Il faut sans doute voir dans ce film, outre un exercice de style jubilatoire sur le thème de l’amitié, l’amour et la mort, un hommage reconnaissant d’Alain Resnais à ses fidèles interprètes.Nicole Vercueil
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