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Réalisation : Albert Serra Scénario : Albert Serra - Image : Jimmy Gimferrer - Montage : Albert Serra - Distribution France : Capricci Films.
Avec :
Vincent Altaio (Casanova), Lluís Serrat Masanellas (Pompeu), Montse Triola (Carmen), Clara Visa (Clara), Noelia Rodenas (Delfinas), Eliseu Huertas (Dracula), Lluis Carbo (père de Carmen)
Né en 1975, Albert Serra étudie la littérature et l'Histoire de l'Art à Barcelone. Son premier long métrage, Honor de cavalleria (2004, une adaptation de Don Quichotte), dont il est à la fois scénariste, réalisateur et producteur, est sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs en 2006. Son deuxième long, Le Chant des oiseaux (les Rois Mages à la recherche de Jésus), l’est aussi en 2008. En 2013, Historia de la meva mort, remporte le Léopard d'or au Festival de Locarno.
Résumé :
Casanova, sur la fin de sa vie, se rend dans les Carpates, en compagnie de son valet Pompeu, pour y écrire ses mémoires. Les voyageurs égarés sont accueillis dans une ferme tenue par un vieillard et ses trois filles. Dracula occupe le château voisin.
Analyse :
Albert Serra déclare « Je n’aime pas le monde contemporain. ». Il choisit donc de développer ses scénarios autour de fictions qui ont fait leurs preuves. Les grands mythes sont revisités avec une image dont l’esthétisme est poussé à l’extrême. Les plans, fixes pour l’essentiel, sont montés par simple juxtaposition, laissant au spectateur interloqué le soin de combler les ellipses.
Dans Histoire de ma mort, le réalisateur revendique son style par le choix du sujet (la rencontre improbable entre Casanova et Dracula), par des images inspirées de la Renaissance (on y trouve par exemple La crucifixion de Saint Pierre du Caravage), par l’utilisation de la durée (dans la première scène il s’attarde sur un plan immobile où seule une main se déplace lentement).
Cet étirement du temps, qui distille un profond ennui, met en évidence le moindre événement - une défécation, une discussion, une lecture - dont Casanova profite pleinement à grands éclats de rire ; mais aussi il permet, dans les relations de Casanova et Pompeu avec les jeunes filles de la ferme, d’allonger la durée de scènes d’un érotisme discret, utilisant images symboliques, hors-champ ou ellipses.
Par son goût des voyages et des livres, son narcissisme, ses relations épistolaires avec les intellectuels contemporains, le héros de Serra se rapproche plus de la réalité de son modèle que du Don Juan invétéré qu’en a fait la légende. Casanova, dans ses dernières années, s’était retiré en Bohème comme bibliothécaire du comte de Waldstein pour y écrire Histoire de ma vie, œuvre abondamment consultée par le réalisateur pour l’élaboration de son film et dont le titre est inspiré.
L’homme des Lumières est donc confronté, dans ce récit, à l’obscurantisme d’un Dracula sorti de la Transylvanie du XVème siècle sous une forme grossière et violente de mythe érotique. Les jeunes filles se rallieront successivement à ce monstre, aux allures policées, jusqu’au sacrifice de leur père. Pompeu et son Maître périront à leur tour, les nouvelles adeptes du vampire se montrant d’une efficacité inexorable.
Le passage des voluptés épicuriennes de l’Italie du XVIIIème aux sombres tableaux de violence évoquant la chasse et la mort, dans des forêts épaisses où se déchaîne la rapacité des loups, pourrait paraître une évocation pessimiste de l’évolution de notre société contemporaine : l’auteur ne se prononce pas sur ce sujet. L’allongement démesuré des scènes décourage souvent l’intérêt du spectateur, mais une fois sorti de salle, celui-ci peut s’apercevoir qu’il en est resté imprégné.
Nicole Vercueil
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