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Réalisation : Sciamma Céline - Scénario : Céline Sciamma – Image : Crystel Baras – Son : Pierre André, Daniel Sobrino – Montage : Julien Lacheray – Musique : Para One – Décors : Thomas Grézoud – Production : Bénédicte Couvreur – Distribution : Pyramide
Avec :
Karidja Touré (Marieme/vic) – Assa Sylla (Lady) – Lindsay Karamah (Adiatou) – Mariétou Touré (Fily) – Idrissa Diabaté (Ismaël) – Simina Soumare (Bébé) – Cyril Mendy (Djibril) – Djibril Gueye (Abou)
Céline Sciamma, née en 1978, signe ici son troisième long-métrage. Après des études de lettres puis la Femis dans la classe de scénario, elle réalise Naissance des pieuvres en 2007 (prix Louis Delluc du meilleur premier film), où elle s’intéressait à des relations adolescentes. Dans Tomboy en 2011, c’est l’enfance, à la veille de l’adolescence, qui est centrale. Bande de filles a ouvert la Quinzaine des réalisateurs à Cannes en 2014.
Résumé :
Marieme vit ses 16 ans comme une succession d’interdits. La censure du quartier, la loi des garçons, l’impasse de l’école. Sa rencontre avec trois filles affranchies change tout. Elles dansent, elles se battent, elles parlent fort, elles rient de tout. Marieme devient Vic et entre dans la bande pour vivre sa jeunesse.
Analyse :
Céline Sciamma réussit merveilleusement une synthèse de plusieurs thématiques apparemment antagonistes : la violence des cités – la solidarité féminine – la joie de vivre.
L’introduction qui précède le générique est à l’image de ces paradoxes : un match de foot américain, sport très violent et joué là par des équipes féminines, mais dont les actions sont présentées au ralenti. Est-ce pour nous annoncer que les filles (des cités ?) sont capables de violence, ou même sommées à être violentes ? Mais le ralenti atténue cette impression…. Et le retour d’un groupe de filles chez elles, après le match, signifie bien que la cité n’est pas un lieu pour leur extériorisation : la conversation, d’abord très animée, voit le ton s’affaiblir, jusqu’au silence complet au fur et à mesure qu’elles passent à proximité de groupes de garçons assis au bord du chemin. On sent monter une certaine angoisse….
La violence dans la cité c’est aussi les affrontements entre bandes rivales : deux filles combattent jusqu’à ce que l’une d’entre elles arrivent à arracher à l’autre son tee-shirt, la laissant humiliée devant tous les spectateurs, garçons et filles. Mais la dimension ludique n’est pas absente. Violences verbales, aussi, très fréquentes, à la limite de l’hystérie. Violence feutrée du racket, des tentatives de vol….
Mais dans la cité les filles sont solidaires. D’abord au sein de la famille où règne une grande connivence entre les sœurs, manifestant leur complicité à travers des signes physiques - en contraste avec la crainte que leur inspire le grand frère qui fait la loi.
Solidarité dans la bande où l’on se soutient dans des projets communs : trouver de l’argent pour louer une chambre d’hôtel pour faire la fête : se maquiller, revêtir des vêtements volés, partir dans des fous rires, chanter, boire du coca, puis dormir, entrelacées, l’une d’elles avec le pouce dans la bouche… Cette chambre est le seul lieu où elles sont libres de se laisser aller, sans tabou ni censure. La bande de filles va ainsi permettre à Marieme de devenir Vic et de s’émanciper peu à peu de sa famille.
Joie de vivre malgré tout. Plusieurs scènes la montrent : fou-rires dans la bande, sortie sur le parvis de la Défense où a lieu une sorte de concours de danse, visage radieux de Vic lorsqu’elle rencontre le garçon qui l’aime…. .
Cécile Sciamma utilise beaucoup de gros plans, sur les visages mais aussi sur des parties du corps qui sont des signes d’appartenance : pieds, chaussures, ventres…. C’est avec leur corps que les personnages féminins s’affirment, avec leurs yeux, leur bouche, leur coiffure.
Quelques plans très larges (rares) : sur le parvis de la Défense, sur une aire de jeux, sont des appels à l’émancipation et à la liberté. Des vues nocturnes des immeubles avec leurs lumières réussissent à donner une vision esthétique de ces lieux.
N’oublions pas la bande musicale très rythmée et parfois lancinante qui sert parfaitement le propos.
« Bande de filles » n’est pas un film de plus sur les banlieues. C’est une œuvre originale très forte.
Maguy Chailley
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