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Avec :
Les habitants de Monrovia, Indiana
Né en 1930 à Boston, Frederick Wiseman est un réalisateur, scénariste et producteur, l’auteur de plus de quarante documentaires illustrant divers aspects de la société américaine : hôpitaux, asiles d'aliénés, écoles, services de police, universités, bibliothèques. Soucieux de coller au plus près de la réalité et de la vérité, il s’attache à filmer la vie quotidienne, sans l’accompagnement d’interviews ou de commentaires.
Résumé :
Monrovia, Indiana (Etats-Unis), une petite ville agricole du Midwest américain de 1.400 habitants, en 2016 (peu avant qu’elle ne vote à 76% pour Donald Trump aux élections présidentielles). La caméra nous conduit sans commentaire dans un lycée, au supermarché, chez un coiffeur, un tatoueur, un armurier, etc. On assiste aussi à une réunion municipale, à une vente de matériel agricole, à une messe d’enterrement, à un mariage.
Analyse :
L’impression qui se dégage à la fin de ce long film est puissante : entre le malaise, l’incompréhension et un certain accablement. Aucune thèse n’y est défendue, au spectateur de se faire son point de vue. « La plupart de mes films sont très politiques, mais pas de manière explicite (…) Mon point de vue est clair mais il faut le chercher pour le découvrir », explique le réalisateur (Télérama, numéro 3615).
D’immenses ciels bleus, troués de nuages blancs, qui planent sur de vastes surfaces cultivées alternent avec des scènes de la vie courante à Monrovia. Pas de musique, ni de voix off : des images brutes, des paysages évoquant parfois ceux de Hopper, des portraits d’habitants ayant la force des Peintures noires de Goya. D’un bout à l’autre du film, la caméra prend son temps pour nous initier à cette Amérique peu connue, presqu’exclusivement blanche. Wiseman a l’habitude de tourner pendant plusieurs semaines avec une toute petite équipe mais le montage dure une année. Et c’est la sélection des séquences, certains arrêts sur image, un rythme particulier ou le choix des scènes qui révèlent son opinion.
Messes évangéliques, concerts de country, ventes aux enchères…, de nombreuses scènes découlent des traditions, mais, à Monrovia, Indiana, ces dernières semblent respectées comme par automatisme, comme si la population s’accrochait à une bouée de sauvetage : ainsi à l’église, ainsi lors d’une cérémonie maçonnique où on ne décèle ni plaisir, ni passion. Des réunions municipales apparaissent, du fait de l’exiguïté du sujet de débat (la commande ou pas d’un banc public, la question d’une bouche à incendie), comme des parodies de démocratie. Plus loin on ressent de la compassion pour un fermier qui doit pousser ses porcs, serrés dans des enclos, vers le camion de l’abattoir. Et un certain dégoût nous étreint très peu de temps après, lorsqu’on assiste à une séquence de découpe automatique de la viande. On retrouve aussi les thèmes classiques de l’obésité, au hasard d’un portrait de client de supermarché, ou des ventes courantes d’armes de tous calibres.
Un ennui intense et l’absence de perspectives et de sens pour ces habitants souvent âgés émanent de cette nouvelle pièce du grand puzzle entrepris par Wiseman pour décrire son pays. C’est très triste.
Françoise Wilkowski-Dehove
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