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Avec :
Tom Conti (Lawrence), Ryuichi Sakamoto (Yonoi), David Bowie (Celliers), Takeshi Kitano (Hara), Jack Thompson (major Hicksley).
Nagisa Oshima (1932-2013) a débuté dans le cinéma dès 1954 et s'est rapidement lancé dans la Nouvelle vague japonaise (Nuberu bagu) dont il est devenu l'un des animateurs, critiquant sans scrupule les idoles universelles de la profession (Y. Ozu, K. Mizoguchi, A. Kurosawa). Motivé par l'analyse des contradictions et tensions de la société japonaise après guerre (Nuit et brouillard au Japon, 1960), son cinéma radical, qui inclut une substantielle production documentaire, a connu une célébrité mondiale après L'empire des sens (1976) et ses scènes non simulées. Il fut désormais souvent sélectionné à Cannes, comme avec Furyo (1983).
Résumé :
Prisonniers de guerre des Japonais à Java (1942), des militaires britanniques et alliés sont confrontés à un système de valeurs qui leur est tout à fait étranger ; de même pour leurs gardiens comme le sergent Hara et le capitaine Yonoi. Ceux-ci, avec le colonel Lawrence, seul à connaître le Japon et en parler la langue, et le major Celliers, qui fascine Yonoi, concentrent les relations entre les deux parties.
Analyse :
Le titre français Furyo (prisonnier de guerre) est légitime, mais moins riche que l'original japonais (Senj? no mer? kurisumasu, Joyeux Noël sur le champ de bataille) et surtout l'international (Merry Christmas, Mister Laurence), dernière phrase prononcée par le déroutant Hara devenu à son tour prisonnier après guerre.
Le film fait inévitablement penser au Pont de la rivière Kwai (D. Lean, 1957), dans le même contexte historique (Birmanie au lieu de Java) ; mais, sans en avoir la vigueur narrative, il alimente une réflexion bien plus riche grâce à un quatuor de protagonistes très originaux. Interprète curieux et subtil de la culture japonaise, Lawrence réagit néanmoins avec force aux comportements qui heurtent ses propres valeurs ; représentant héroïque de la tradition samouraï, Yonoï, évocateur d'un nationalisme à la Mishima, est perturbé par son attirance pour Celliers. Ces deux-là, interprétés par deux vedettes de la pop music (Sakamoto est d'ailleurs le compositeur de la B.O. de Furyo, ce que Bowie a décliné pour assumer pleinement son travail d'acteur), fonctionnent en miroir : deux modèles de beauté androgyne, le brun et le blond, dont l'un adhère absolument aux règles de sa fonction alors que l'autre ne respecte que les valeurs derrière les codes. Plus énigmatique, le sergent japonais qui camoufle ses réactions par un rictus de façade (Hara-qui-rit), personnage imprévisible, rustre et brutal mais finalement d'une grande humanité, est fort bien campé par un Takeshi pas encore Kitano (il n'utilisera son propre nom qu'une fois devenu réalisateur).
Construit d'après l'œuvre autobiographique du Néerlandais Laurens Van der Post, Furyo met aussi en scène, entre autres, l'homosexualité réprimée ainsi que, bilatéral, le colonialisme : la présence européenne en Insulinde ayant en face d'elle l'impérialisme japonais et les Coréens assujettis. Des images fortes, comme celle de la visite nocturne de Yonoi au site d'exécution de Celliers, ponctuent un spectacle riche en motifs d'intérêt.
Jacques Vercueil
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