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Avec :
Yuriy Borisov (capitaine Fiodor Volkogonov), Timofey Tribuntsev (major Golovnia), Alexandre Yatsenko (major Gvozdev), Nikita Koukouchkine (colonel Jikharev).
Natalia Merkoulova, 43 ans et Alexei Tchoupov, 50 ans, sont un couple de scĂ©naristes et cinĂ©astes russes : Parties intimes (2013), L’homme qui a surpris tout le monde (nombreux prix, Grand Prix Ă Honfleur en 2018). Ils sont Ă©galement co-scĂ©naristes de Saliout 7 (Kim Chipenko, 2017). Le capitaine Volkogonov s’est Ă©chappĂ© Ă©tait sĂ©lectionnĂ© Ă Venise en 2021. AprĂšs avoir dĂ©noncĂ© l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ils sont partis en 2022 Ă Bakou.
Résumé :
Leningrad-Saint Petersbourg, 1938. C’est la Grande Terreur. Staline purge aussi le NKVD (ancĂȘtre du KGB-FSB) et l’armĂ©e. TĂ©moin d’un suicide qu’il n’aurait pas dĂ» voir, le capitaine Volkogonov s’enfuit, devenant lui-mĂȘme un traĂźtre. TraquĂ© par ses anciens camarades, il a une vision et se met en tĂȘte d’obtenir le pardon des familles des innocents assassinĂ©s, afin d’accĂ©der au paradis.
Analyse :
Ce film, sorti en France en mars 2023 mais interdit de distribution en Russie (aprĂšs avoir reçu un soutien officiel en 2021), s’inscrit dans l’une des pages les plus noires de l’Histoire soviĂ©tique, celles des purges de la fin des annĂ©es 1930. Empruntant au rĂ©cit historique, au fantastique et au thriller, ce film impressionnant livre une description assez prĂ©cise de la mĂ©canique de la Grande terreur qui conduisit Ă arrĂȘter et Ă assassiner des innocents, dans un contexte de dĂ©chĂ©ance morale gĂ©nĂ©ralisĂ©e. En 1938, le NKVD de sinistre mĂ©moire est alors tout puissant mais Staline a ordonnĂ© de l’Ă©purer. Le film, aux couleurs sepia du passĂ©, est tournĂ© Ă Saint PĂ©tersbourg, dans une reconstitution magnifique oĂč le rouge (alors inhabituel, la grisaille Ă©tait plutĂŽt la norme) se dĂ©tache (survĂȘtements des policiers, affiches appelant les prolĂ©taires Ă s’unir, etc.) comme pour indiquer qu’on se trouve bien en enfer. TraquĂ©, le hĂ©ros, lui-mĂȘme un ancien tortionnaire (comme on le voit dans les flash-back sur les atrocitĂ©s commises et les ‘mĂ©thodes spĂ©cifiques’, c’est-Ă -dire la torture), va effectuer un vĂ©ritable chemin de croix dont ses visites aux familles des victimes sont les Ă©tapes. Ethymologiquement, le nom de ‘Volkogonov’ rappelle que le loup doit courir pour survivre : dans sa tentative de rĂ©demption, le capitaine doit rester en vie s’il veut espĂ©rer gagner la vie Ă©ternelle aprĂšs un potentiel pardon des parents des victimes. AthlĂ©tique, le visage dĂ©terminĂ©, Yuriy Borisov interprĂšte bien l’Ă©volution du capitaine, qui prend conscience peu Ă peu de l’Ă©tendue de sa faute et dĂ©tricote le processus de condamnation. Ses rencontres avec les familles permettent l’Ă©vocation de faits historiques, comme le rĂ©cit de la condamnation d’une femme simplement pour avoir racontĂ© une blague. Elles montreront que tout pardon est impossible. Le rythme est soutenu tandis qu’on se demande Ă chaque fois qui arrivera le premier chez les familles : la proie ou les chasseurs.
C’est un temps de l’inversion des valeurs, oĂč la victime est coupable et oĂč le bourreau se pare des habits de l’agneau. C’est un monde de la peur, du mensonge et de la dĂ©lation, avec faux procĂšs et exĂ©cutions. Selon l’historien Nicolas Werth (Le livre noir du communisme, 1997 Robert Laffont), rien qu’entr’ aoĂ»t 1937 et novembre 1938, la rĂ©pression stalinienne a arrĂȘtĂ© 1,5 million de personnes et 750.000 ont Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©es.
Un film magistral !
Françoise Wilkowski-Dehove
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