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Avec :
Sandra Drzymalska (Kassandre) ; Thomas Organek (Ziom) ; Matheusz Kosciukiewicz (Mateo) ; Lorenzo Zurzolo (Vito) ; Isabelle Huppert (la comtesse).
Jerzy Skolimowski, né en 1938 (84 ans), est un cinéaste, acteur et artiste peintre polonais. C’est un des grands noms du Nouveau cinéma polonais des années 60. Il commence par écrire des poésies et des scénarii et réalise son premier film en 1959, à 21 ans. Il a rapidement une carrière internationale très récompensée : Ours d’or à Berlin pour Le départ (1967), Grand Prix du jury à Cannes pour Le cri du sorcier (1978) et Prix du scénario pour Travail au noir (1982). Après de nombreux prix à Venise dont Le Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière (2016), il a obtenu le Prix du Jury à Cannes 2022 pour EO.
Résumé :
EO nous conte les vicissitudes d’un petit âne gris aux yeux mélancoliques. Un portrait très pessimiste de la société actuelle à travers le regard et les aventures de cet animal si attachant.
Analyse :
En tournant l’histoire d’un petit âne gris Skolimowski a bien sûr pensé au chef-d’œuvre de Robert Bresson Au hasard Balthazar de 1966 dont il dit que c’est le seul film à l’avoir profondément touché. Mais combien différent de son modèle car même si l’âne dans les deux cas est au centre du récit, il y a chez le réalisateur polonais des options cinématographiques radicalement différentes ! Sorte d’ovni du cinéma, d’une inventivité, d’une jeunesse incroyable de la part d’un monsieur de 84 ans.
EO est au départ un animal de cirque, cajolé par Kassandra avec laquelle il effectue un numéro. Puis sa vie change lorsque la loi interdit les animaux dans les cirques. Commence alors une vie errante, de la Pologne à l’Italie, en passant par le palais italien d’une comtesse décadente ; une vie chaotique rencontrant des joies mais surtout des douleurs, de très mauvaises personnes et de rares bonnes. Ce petit âne est plein d’humanité qui se manifeste à travers son regard tendrement mélancolique, ses états d’âme, nostalgique quand il pense à Kassandra, envieux et sombre lorsqu’il constate la différence de traitement entre lui et des étalons bichonnés, lui qui « n’est qu’un âne ».
Pour montrer le chaos de notre monde actuel qui instrumentalise les animaux à des fins économiques et maltraite la nature, Skolimowski a utilisé les techniques que le monde moderne met à sa disposition, drones, objectifs déformants, flashs stroboscopiques, accompagnés d’une musique assourdissante pour secouer le spectateur. Une magnifique dépense de couleur, le rouge essentiellement qui nappe le paysage ou certaines scènes, le rouge de la souffrance de l’animal blessé. Comme pour manifester son indignation devant une société brutale et cruelle, entre les supporteurs de foot, les forains, les hooligans à la cruauté gratuite et absurde, le réalisateur fait sortir la caméra de ses gonds qui tournoie avec les pales d’une éolienne, des images hallucinées qui sautent, tournent, sont projetées à l‘envers ou sont rembobinées, des travellings virtuoses, des jeux de lumière audacieux.
Un film brillant, original, plein de poésie et d’inventivité, dont beaucoup de nos jeunes réalisateurs trop sages devraient s’inspirer.
Marie-Jeanne Campana
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