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Avec :
Karim Leklou : Ismaël Saïdi ; Shaïn Boumedine : Aïssa Saïdi ; Lubna Azabal : Nadia ; Samir Guesmi : Adil ; Vivian Sung : Julie ; Laurent Lafitte : Général Gaillard.
Rachid Hami, né en 1985 à Alger, est un acteur et réalisateur français. Il a notamment joué pour Abdellatif Kechiche, Louis Garrel, et Arnaud Desplechin qui le soutient depuis le début. Après un court métrage et un moyen métrage, Choisir d'aimer, primé, il réalise son premier long métrage, La Mélodie, en 2017, puis en 2022 Pour la France (d'après l'histoire arrivée à son propre frère, décédé en 2012), présenté à La Mostra dans la section Horizons et au Cinémed à Montpellier la même année.
Résumé :
Après un «rituel d'intégration» appelé bahutage à Saint Cyr, un jeune officier de 23 ans, Aïssa, périt noyé. Le film revient ensuite sur son passé, ses motivations à entrer dans l'Armée et les relations familiales en Algérie, en France et à Taïwan où il était parti étudier auparavant, tandis que la mère, Nadia, et l'aîné des fils, Ismaël, insistent auprès de l'Armée pour qu'elle lui organise des funérailles militaires.
Analyse :
Le réalisateur a éludé l'enquête criminelle destinée à établir les responsabilités à Saint Cyr (objet d'un procès en 2020) pour se concentrer sur les rapports des endeuillés avec la hiérarchie militaire, au sein de laquelle le général joué par Laurent Lafitte est exemplaire d'humanité, et le passé familial de cette mère (Loubna Azabal tout en fermeté et pudeur) et de ses fils ayant fui l'Algérie pour échapper à la terreur du Front Islamique de Salut lors de la décennie noire (1991-2002). Cela sous le regard à la fois douloureux et attentif d'Ismaël, interprété avec charisme par un Karim Leklou cherchant à comprendre ce drame comme les choix de son frère cadet avec lequel la relation n'a pas été univoque.
Si l'évocation de la vie en Algérie et en France comme de la hiérarchie militaire convainquent en quelques plans efficaces, la partie taïwanaise - décrivant avec plus de légèreté comment Aïssa s'épanouit sur les plans intellectuel pendant ce master à l'étranger et amoureux avec Julie, sa compagne asiatique, alors qu'Ismaël, un peu boulanger et un peu voyou, est un rebelle solitaire parfois violent – aurait gagné à être montée plus serré et avec moins de complaisance à illustrer une ville, Taipei, d'où provient une partie du financement du film, même si elle a pour intérêt de dépasser le dilemme France-Algérie si lourd de connotations pour les spectateurs français...
Film politique et intime en même temps qui touche et interroge en valorisant le parcours atypique d'un «immigré» à la trajectoire ascendante au sein d'une prestigieuse institution dont il aurait épousé les valeurs sacrificielles si le destin, ou plutôt le sadisme de quelques camarades, n'avait pas frappé. Le cérémonial funèbre, filmé avec émotion, gravité et sobriété, rend hommage au défunt, à l'Armée française et à la tolérance religieuse : catholicisme compassionnel du général en aparté avec Ismaël pendant la veillée funèbre, islam modéré de la famille Saïdi.
Rachid Hami dit s'être inspiré de Caïn et Abel pour la relation fraternelle et d'Antigone face à Créon pour la négociation funéraire.
Le portrait du personnage d'Ismaël à l'identité complexe, déchirée, est un autre atout de ce film.
Le film s'organise en anamnèse autour du si juvénile cadavre, filmé depuis tous les angles raidi dans son uniforme rouge et bleu : scandale de cette jeunesse sacrifiée pour rien, uniforme qui magnifie et dignifie le personnage du défunt frère de Rachid Hami, frère dont la quête du père manquant (Samir Guesmi, poignant), militaire lui aussi, est sans doute une des causes de l'engagement au service de sa seule patrie, celle où il vit, la France.
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