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Né le 3 novembre 1968 à Recife, Kleber Mendonça Filho passe quelques années en Angleterre, puis revient à Recife en 1987. Il suit une formation de journaliste, et devient critique responsable de la section cinéma de la Fondation Joaquim Nabuco où il reste 18 ans. Son premier long métrage est un documentaire : Crítico (2008), le second Les bruits de Recife, une fiction lauréate de 32 Prix. Le suivant, Aquarius (2016), a été sélectionné au Festival de Cannes ainsi que le troisième, Bacurau (2018), qui y a obtenu le Prix du Jury.
Résumé :
Ce film est un documentaire sur des souvenirs de jeunesse du réalisateur, avec des extraits de vidéos personnelles ainsi que de films d’époque, dans les vieux quartiers disparus de Recife. Une certaine forme d’archéologie nostalgique.
Analyse :
« Les films de fiction sont les meilleurs documentaires ». Kleber Mendonça Filho l’affirme dans ce film par l’intermédiaire d’un personnage qui apparaît, murmure à l’oreille du réalisateur, puis disparaît dans les coulisses du cinéma San Luiz. Ses fictions Les bruits de Recife et Aquarius sembleraient le confirmer. Cependant son amour pour sa ville est le plus fort et, dans ce documentaire, Kleber veut nous le faire partager avec une telle tendresse que nous en sortons émus.
Des photos anciennes de rails sur fond de couleurs pastels, puis un vieux film sur une course de voitures en 1960 : comme Kleber est né en 1968, il ne peut pas être l’auteur de ces images de début, elles annoncent simplement un voyage accéléré dans le temps passé, en trois points.
Sétubal est un quartier de Recife où est né le réalisateur. La maison, dont sa famille occupait les premier et dernier étages, n’était pas éloignée de la plage. Il y a vécu quarante ans et en a filmé très tôt, avec ses amis d’enfance, toutes les transformations ainsi que celles du quartier. Les extraits de ces films dévoilent des mouvements de caméra et surtout un cadrage très innovants. L’appartement en devient exigu grâce à la jeunesse et l’inventivité de cette période. Mais on assiste aussi à la dégradation progressive du quartier avec des termites envahissantes, la nature qui reprend ses droits, des grilles rehaussées, signe de la montée de la violence et de la peur.
Les cinémas du centre évoluent aussi sous le regard du réalisateur. « Quand on aime il faut le dire » confie-t-il. Et voici, à nouveau vivants, l’Art Palace où il a travaillé avec son vieux mentor, le projectionniste Alexandre, le Trianon, le Sao Luiz etc... Les séquences, presque toutes en flashes-back, nous baladent dans les coulisses et nous y perdent un peu, avec bonheur, dans le temps et dans l‘espace, pour nous montrer des décors insolites. Puis ces cinémas déclinent et meurent pour laisser la place à des hypermarchés ou à des Eglises évangéliques, certaines d’entre elles conservent les lieux en état et profitent de l’écran.
Et les fantômes ? Le chien du voisin, mort depuis deux ans, aboie dans la nuit pendant un tournage, un chauffeur de taxi sait disparaître et réapparaître en conduisant, un personnage de noir vêtu s’envole sur un pont…
Kleber montre des raisons multiples d’aimer sa ville dans ses moindres personnages, ses moindres pans de murs tagués, les magnifiant dans leur simplicité. Les immeubles récents et leur gigantisme en deviennent transparents.
Nicole Vercueil
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