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Il peut paraître paradoxal d’associer Bible et Western : pour beaucoup, le western est lié à la vision de cow-boys poursuivant des indiens ou à des bagarres d’ivrognes dans des saloons, ce qui ne paraît pas très « biblique ». Et pourtant la Bible nourrit fortement l’inspiration des grands westerns classiques.
Le western raconte l’épopée fondatrice de la nation américaine, une sorte d’Iliade et Odyssée américaine servant à expliquer et justifier la conquête du territoire. Or l’origine du peuplement des Etats Unis n’est pas indépendante d’un projet religieux. Les passagers du Mayflower, les Pilgrim Fathers, sont des Anglais en quête de liberté religieuse qui ont d’abord trouvé asile quelques années à Leyde mais espèrent trouver de meilleures conditions de vie outre-Atlantique. Ils abordent l’Amérique comme une terre promise, qui leur est destinée par Dieu mais qu’il leur faudra conquérir par une lutte contre un milieu hostile et la rendre conforme au projet de Dieu.
La conquête de l’Ouest déplace progressivement la frontière de la Terre promise. On y retrouve le même processus que celui de l’arrivée des premiers colons : il y a d’abord séparation de la communauté originelle et plongée - régression dans un milieu plus primitif, et dans un deuxième temps, fondation d’un ordre nouveau, souvent fortement imprégné de culture biblique. La référence religieuse justifie la conquête des territoires par la force, au détriment des indiens.
Mais la Bible est aussi le livre de référence des Américains
Elle n’est pas un élément de culture seulement pour les personnages des westerns, elle l’est aussi pour les réalisateurs et les spectateurs : la grande époque de réalisation des westerns « classiques » est entre 1946 et 1964. A cette époque la pratique religieuse est encore extrêmement répandue (96% des Américains selon une enquête de 1957).
On va donc trouver dans les westerns un grand nombre de références religieuses, explicites ou implicites.
En premier lieu l’Eden et la Terre promise. Dans de nombreux films, la beauté des paysages suggère la comparaison avec l’Eden. Dans La piste des géants (The Big Trail) de Raoul Walsh, un pasteur dit que « les séquoias sont le témoignage éternel de l’œuvre de notre Créateur. Ils ont 4000 ans comme la Bible et la foi »
Les convois de wagons en marche sur fond de musique religieuse évoquent explicitement le voyage vers la Terre promise. Ainsi Le convoi des braves, de John Ford, Convoi de femmes, de William Wellman ou Les affameurs d’Anthony Mann.
Le deuxième thème très présent dans les westerns est le respect des valeurs de la Bible : lecteurs de la Bible, les colons connaissent les désagréments de la désobéissance à Dieu. Pour conserver la Terre promise et le bénéfice de l’alliance avec Dieu, la fidélité à la loi divine est impérative.
Il en résulte une exigence morale extrême. Il faut faire son devoir, même seul contre tous : Rio Bravo, de Howard Hawks, Le train sifflera 3 fois de Fred Zinnemann en sont deux exemples. Et ceci peut conduire à un conflit moral face au commandement « Tu ne tueras point » comme pour la femme quaker du Marshall Kane de ce dernier film. Elle est devenue quaker par haine de la violence mais se résout à tuer quand la vie de son mari est en danger. Dans la plupart des westerns classiques, le héros finit par tuer le méchant !
Il faut aussi fuir le mal : de nombreux films opposent les fermiers, dont le travail est béni, aux chercheurs d’or qui pervertissent la ville : Les affameurs d’Anthony Mann, Rivière sans retour de Otto Preminger.
Il faut mettre en pratique l’Evangile : le « général chrétien » trouve un accord avec Cochise au nom de l’Evangile dans La flèche brisée de Delmer Daves
Enfin, de nombreux films portent le thème de la Rédemption : Le héros de western est souvent un héros déchu voire un bandit au début du film, il va peu à peu prendre la défense de l’opprimé et éventuellement se sacrifier. Les affameurs, Rio Bravo, Le Fils du Désert (rédemption après la traversée du désert) de John Ford en sont de bons exemples.
On trouve dans les westerns la description de groupes religieux et de la pratique religieuse : quakers et méthodistes dans La loi du Seigneur, de William Wyler, mormons dans le convoi des braves de John Ford. Dans La prisonnière du désert,on voit un pasteur qui est également capitaine de Rangers, et John Ford tire des effets comiques de ses changements de casquette.
L’objet Bible est omniprésent : c’est par exemple, de manière très surprenante, le livre de lecture de Billy the Kid dans Chisum, de Andrew McLaglen. On voit Billy the kid lisant la Bible dans un cadre paradisiaque ; tout y est : le Jardin d’Eden, la Bible comme apprentissage de la lecture, Caïn et Abel et le meurtre, la Bible ou le fusil.
Dans La prisonnière du désert (John Ford) le capitaine Ranger - pasteur donne une Bible au cours d’une bataille à un blessé en lui disant « ça te fera du bien ». Dans La fille du désert de Raoul Walsh, une Bible apportée dans une prison contient un plan d’évasion. Et bien sûr de multiples scènes d’enterrement comprennent une lecture de la Bible.
Les westerns contiennent de nombreuses situations de frères ennemis, ou d’amitiés fraternelles tournant mal qui font penser à Caïn et Abel. On en verra ainsi dans Les affameurs.
Dans La lance brisée de Delmer Daves, la situation initiale reprend l’histoire de Joseph : le fils préféré, nommé Joe, est en butte à la jalousie de ses frères.
Jacques Champeaux
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