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Kirill Serebrennikov est né le 7 septembre 1969 en URSS. Il termine ses études secondaires avec une médaille d'or. En 1992, il est diplômé en sciences physiques à l'Université de Rostov. Avant même d'avoir terminé ses études, il fait de la mise en scène au studio d'amateurs "69" et à partir de 1990, il fait des mises en scènes remarquées dans différents théâtres (Théâtre « Engagement », Théâtre Maxime Gorki). À partir de 1991, il réalise des films pour la télévision de différents types (documentaires, publicités, télé spectacles...). En 1999, il a reçu le Prix national de la meilleure réalisation télévisée et, en 2006, le prix du Festival international du film de Rome. En août 2012, il est nommé directeur du Théâtre dramatique de Moscou, Nikolas Gogol. Il réalise plusieurs longs métrages dont, en 2016, Le Disciple qui a reçu au Festival de Cannes 2016 le prix François Chalais dans la section Un certain regard. Leto (L’Été) a reçu au Festival International du film d’Amiens le grand prix du long-métrage.


Leto

Réalisé par Kirill Serebrennikov, Russie, France, 2018, 127min.

Leningrad. Un été du début des années 80. En amont de la Perestroïka, les disques des groupes rocks américains s'échangent en contrebande, et une scène rock émerge. Mike et sa femme rencontrent le jeune Viktor Tsoï. Entourés d’une nouvelle génération de musiciens, ils vont changer le cours du rock’n’roll en Union Soviétique

En réalisant cette ode à la liberté qu’est Leto, Kirill Serebrennikov ne savait pas qu’il perdrait la sienne avant la fin du tournage de son film. Assigné à résidence en Russie sous une accusation de détournement de fonds publics qu’il nie farouchement, le réalisateur n’a pu être présent à Cannes pour présenter son œuvre. Nous sommes dans les années 80 à Leningrad, la ville la plus « occidentale » à l’époque. Brejnev meurt en 82, suivi par Andropov, Tchernenko puis Gorbatchev. Même si les lueurs de la Perestroïka s’annoncent doucement, la répression, la volonté de contrôler toute expression individuelle atteignent des sommets d’absurdité. Pour endiguer la fougue de la jeunesse le pouvoir permet l’ouverture d’un « club de rock » sous haute surveillance policière. Ce sont les premières images du film. Des jeunes qui resquillent en passant par des fenêtres sur cour pour assister à un concert de rock du groupe Zoopark dans un salle bondée et cernée de gardes. On ne peut qu’applaudir mais ni se lever, ni danser. Serrebrennikov a l’habileté de filmer des pieds qui battent la cadence et des corps qui se trémoussent et trépignent sur leurs chaises réprimant la farouche envie de se lever, et surtout la joie sur les visages. C’est la musique de ces années, venue d’Amérique, qu’écoutent et qu’imitent les fondateurs des premiers groupes rocks soviétiques qui se passent sous le manteau les disques de contrebande des Doors, T. Rex, David Bowie, Lou Reed, Velvet Underground, Beatles et les autres. Mais avec des textes pleins d’amertume et de nihilisme (Je suis un glandeur – t’es qu’une merde – j’ai besoin d’une bière – je plante mes cornichonsetc…). C’est l’été (leto), la période des nuits blanches que l’on passe sur la plage à se griser de musique folk et de vin avant de se jeter à l’eau en tenue d’Ève et d’Adam.

Le film n’est pas un biopic mais il est basé sur la vie de Viktor Tsoï, incarné par Teo Yoo, eurasien ténébreux qui fut une gloire du groupe Kino, mort accidentellement en 1990 à l’âge de 28 ans et qui est resté une légende. Il met surtout en lumière un autre rockeur moins connu, Mike Naumenko, mort lui aussi jeune, à 36 ans en 1991, dont le rôle est tenu par Roma Zver, rockeur actuellement populaire en Russie. Ce dernier prendra son cadet sous son aile et l’aidera à émerger. Avec une générosité qui n’est pas sans rappeler l’esprit communautaire des jeunes de mai 68 car il accepte l’amourette qui se noue entre Viktor et sa femme, la belle Natacha (superbe Irina Starshenbaum), dans un triangle amoureux à la Jules et Jim. Comme en 68 on retrouve une jeunesse ardente, insouciante, éprise de liberté, rétive à toute autorité (Il est interdit d’interdire).

Dans un magnifique noir et blanc, le plus souvent dans l’atmosphère confinée et enfumée de leurs appartements ou de la salle de concert, la mise en scène de Serebrennikov est audacieuse et originale (on retrouve le réalisateur du Disciple). Il parsème son film d’encarts colorés où sont gribouillés des textes à la main, et de scènes oniriques et électrisées, avec un personnage improbable qui surgit en nous indiquant que « ça n’a pas existé » ! (entendons On aimerait bien que cela existe !). Avec habileté et intelligence le réalisateur montre par des plans séquences d’une grande virtuosité les rêves et les aspirations d’une jeunesse qui ouvrent la voie à une prochaine réalité. La passion de la musique rock qui est au cœur du film procure une énergie vivifiante et communicative qui n’est pas exempte d’une certaine mélancolie. 

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