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Avec :
Myriem Roussel (Marie), Thierry Rode (Joseph), Philippe Lacoste (Gabriel), Juliette Binoche (Juliette), Anne Gautier (Eva), Johan Leysen (Johan).
Jean-Luc Godard, réalisateur franco-suisse, né en 1930 à Paris, est décédé en septembre 2022 à Rolle en Suisse (Vd). Cinéaste majeur dans l’histoire du cinéma moderne, il demeure la figure de proue d’un renouveau radical baptisé « Nouvelle Vague ». En 1960 A bout de souffle fait figure de manifeste. Le petit Soldat (1960), Une femme est une femme (1961) Le Mépris en 1963, Pierrot-le-Fou (1965) sont les marqueurs des années 60. Deux autres périodes de création suivront: celle des années 80, puis celle des années 2000 marquée par des films assez difficiles d’accès. Je vous salue Marie appartient à la deuxième période, celle de Passion (1982) et Prénom Carmen (1983)
Résumé :
Genève, années 80. Gabriel atterrit un soir à l’aéroport de Genève. Il est accompagné d’une petite fille qu’il tient par la main et qui l’appelle : oncle. Tous deux montent dans un taxi conduit par Joseph. Ils se font amener jusqu’à une station-service, tenue par le père de Marie. Gabriel demande à voir Marie. En présence de Joseph, son fiancé, il lui annonce qu’elle va avoir un enfant. Marie dit que pourtant elle ne couche avec personne. Joseph est furieux, bouleversé.
Analyse :
Je vous salue, Marie : selon Luc l’évangéliste, ce sont les paroles de salutation que l’ange Gabriel adressa à la petite Marie, lorsqu’il vint lui annoncer la mission qui lui était échue. Ce sont aussi les premières paroles d’une prière séculaire de l’église catholique qui, de ce fait, s’est sentie bafouée dans sa foi par un film jugé blasphématoire : énorme malentendu. Godard, qui n'a jamais fait mystère de ses racines protestantes, n’est pas religieux. Je vous salue, Marie n’est pas un film religieux. Par contre, il interroge les textes bibliques. La Genèse proclame la grandeur cosmique de la création : la lumière, le vent tel le souffle d’Elohim, les deux grands « luminaires » que sont le disque solaire, immense, majestueux, telle la présence de Dieu, et la lune, pleine comme Marie face à l’irreprésentable. Dans l’évangile de Luc, à la lumière de la psychanalyse et inspiré notamment par L’évangile au risque de la psychanalyse de Françoise Dolto, Godard explore le mystère de l’élection, et celui de l’incarnation : ‘l‘âme a -t-elle un corps ?‘, s’interroge Marie. Et c’est le corps dévêtu de Marie qui est au cœur du film, chair habitée par la Parole. Mais alors : y a-t-il en nous quelque chose qui aurait été fixé d’avance, choisi sans demander notre accord ? Marie, dans la dernière séquence, murmure ‘je suis de la Vierge. Je n’ai pas voulu de cet être’. A l’écran : sa bouche grande ouverte, comme figée dans un cri muet, les lèvres rouge sang autour d’un grand trou noir, mêlant le sang de la parturition et celui de la crucifixion.
Oui, Godard est un iconoclaste : il refuse l’image qui prétendrait représenter le mystère. Il préfère la métaphore, il adore les calembours. Certains en sont agacés, d’autres y trouvent un langage d’une exceptionnelle richesse. Godard est un iconoclaste mystique: ‘je pourrais dire que moi aussi je n’ai pas voulu de ce film : je l’ai simplement enregistré’.
Françoise Lods
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